Ville: Strahovská knihovna, à voir, vraiment
Après que Simon (prononcez Saillemone, il est Australien) eut découvert qu'il y avait de la verdure à Prague ("Petřín"), qu'il y avait même autre chose que le pont Charles et "Hradčany", il eut la surprise d'apprendre après 3 ans sur le sol Tchèque, qu'il y a même un "Strahov", habité par des Prémontrés (du doigt), et surtout une bibliothèque de "Strahov" qui mérite le coup d'oeil. "Ah... ça se visite?" me demanda-t-il surpris? "Alors ben oui, ça se visite" lui répondis-je. Et même en payant un peu, (50 CzK = 1,67 €) tu peux prendre des photos. Mais alors comme d'habitude, sans flash et sans... eh attends quand même, je vais demander parce qu'on ne sait jamais, hein, des fois que les p'tites vieilles... "Ah bon, on peut avec un trépied?" Super, alors oui, je prends le truc en plus... youpi, hourrraaa!!! Et donc on arrive dans la bibliothèque, et là... enfin bon, regardez les photos, et surtout allez-y, je ne sais que vous dire d'autre. Oh puis si, tiens: splendide. Bon, les miennes de photos ne sont pas maxi-top, je vous l'accorde, mais c'est parce que je n'avais pas trop de temps (je n'étais pas seul) pis je ne faisais pas trop attention non plus parce qu'on avait à peine une demi-heure pour se terminer avant que ça ferme. Et ça ferme tôt ici les musées, faites gaffe, genre 17h maxi ils tirent le rideau et il y en a des, que c'est même 16h.
Et comme j'ai lu récemment que les blogs longs ne sont pas lus (ce qui m'étonne, d'autant plus que les miens sont de qualité, les autres je ne dis pas, mais les miens...) je me suis dit tiens, je vais en faire un court cette fois-ci. Puis surtout ça tombe bien, parce que comme je n'ai pas vraiment le temps, ben ça va le faire aussi. Bref, je vais donc vous passer les peintres, les statues, les machins et les bidules, et vous filer des infos que vous ne trouverez pas forcément dans votre petit guide bien fait. Oh puis si, allez rapidement alors, un peu d'histoire...
Bon, la toute première bibliothèque date du début du XII ème siècle. A l'époque c'était encore petit, parce qu'entre les moines qui ne savaient pas écrire, et ceux qui savaient mais qu'il leur fallait 3 ans pour dessiner une page (pas comme moi avec mes publies, oui je sais), donc des livres dans la bibliothèque, il n'y en avait pas velu à se mettre sous l'oeil. Pis au fur et à mesure on commença à n'en mettre du livre, avec l'invention de l'imprimerie (merci à "Johannes Gensfleisch"). Mais pas de chance, les guerres, les hussites, puis les Suédois en 1648... et surtout ce fumier de général Königsmark qui pilla bien proprement et bien systématiquement la bibliothèque (et d'autres) pour emmener tout son butin en Suède, où de toute façon il n'y avait pas un couillon pour lire le Tchèque. Bon je déconne, c'était surtout en Allemand et en Latin que c'était écrit, et ça, les Suédois ils le comprennent quand ils ont de l'élevage.
Allez on passe vite, donc 1950, les con-munistes chassent les curés, 1989 on chasse les con-munistes, et début des années 1990, les Prémontrés (du doigt) récupèrent leur abbaye ainsi que la bibliothèque, qui va avec. Et bien que pillée, incendiée, dévastée, puis non entretenue, elle comporte encore et toujours quelques 200.000 ouvrages, majoritairement du XIV ème au XIX ème siècle, dont quelques 1500 sont des primo-éditions (première édition, ça ne vous dit rien, tiens, regardez voir combien se paye une première édition de Tintin ou d'Astérix aujourd'hui, et c'est pas du XIX ème, voire avant) et 3000 manuscrits (écrits à la main). Et donc quand vous y irez, parce qu'il faut que vous y alliez, vous y verrez 2 salles.
La salle théologique date du milieu du XVII ème siècle. C'est la plus ancienne des deux (salles), et c'est aussi celle que vous verrez en second si vous suivez bien le guide. Bon, pis juste dans le fond, mais vous ne pouvez pas le voir parce que l'accès à la salle est interdit (mais pas pour moi :-) il y a un portail en fer forgé au dessus duquel est inscrit "Initium Sapientiae Timor Domini" (La crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse, "Psaumes", chapitre 110, verset 10). C'est effrayant de connerie! Enfin quoi, n'y aurait-il pas de sagesse sans crainte (du saigneur de surcroît :-) ? Ben voilà, tiens, hop, parti dans la philosophie qu'on est. Bon j'avais prévu de faire court, alors "Gloria Patri et Filio, et Spiritui Sancto... et viva tutti quanti... Amen" et hop, on passe à la suite. La salle est pleine de globes terrestres et astronomiques, genre vous savez, chez Atlas et Monsieur Meuble, que quand vous l'ouvrez, il y a de la place pour les bouteilles de gnole. Ces couillons là, fabricants de meubles pour pauvres qui veulent faire riches, en ont fait du kitch à cent balles, mais à l'époque, au XVII ème siècle, la famille "Blaeu" (n'essayez pas de prononcer, c'est Hollandais, donc imprononçable) avait bâti sa réputation sur ces globes, cartes et atlas, de véritables oeuvres d'art que c'était. Tiens, je vous en ai même trouvé sur la toile du "Blaeu". Pis c'est tout, je ne vous dirai rien de plus. Si, la salle a été entièrement restaurée début 1990 et interdite au public parce que le touriste ça souffle, ça crache, ça tousse, ça mouche, ça renifle, ça transpire, puis ça pète parfois même, et donc ça humidifie empuante tellement la salle que ça bousille les fresques et les ouvrages précieux.
Pis il y a la salle philosophique, ma préférée à moi parce que je la trouve plus belle, et surtout aussi que pour moi, la philosophie par rapport à la théologie... bref ma préférée, plus récente (fin du XVIII ème siècle) que l'autre et la première que vous verrez si vous suivez le guide comme il faut (le suivre). Bon, un truc rigolo, la galerie du dessus est accessible par des escaliers en colimaçon qui sont planqués (des 2 côtés) derrière une rangée de faux livres, essayez de les retrouver :-) La monumentale fresque au plafond représente l'évolution spirituelle de l'humanité, imperceptiblement dans le sens théologique (l'évolution) mais surtout et énormément dans le sens intellectuel du terme. Dans le fond on reconnaît Moïse avec l'arche d'alliance ("Ignoto Deo"), puis plus loin les rois David et Salomon, Noé, Abel et Caïn... et même parait-il (selon la charmante dame qui surveillait que je photographiais avec l'autorisation qui allait bien) Adam et Eve (mais moi je ne les ai pas trouvés, et pourtant ils sont reconnaissables à leur fringues de marque). La parti gauche de la fresque représente l'évolution de la civilisation grecque, jusqu'aux grands philosophes. Ca me va mieux comme thème. Les trois représentés presque au fond, c'est Socrate, Diogène dans son tonneau, et le présocratique Démocrite d'Abdère. Et au milieu de la fresque, toujours sur la gauche, le grand gaillard bien bâti qui regarde son roussin blanc Bucéphale, c'est Alex, Alex le gland... le grand, en compagnie de son percepteur :-) Aristote. Allez on porte son regard sur la droite, et là, on y voit l'évolution de la science. Donc le dieu de la médecine Asclépios ("Aesculapius"), fils d'Apollon et de Coronis, fille unique du roi Phlégyas de Béotie, vous savez, les fameux Béotiens... (ah pour sûr, Apollon n'avait pas choisi la plus intelligente, mais celle qui avait les plus gros nichons, comme toujours :-) Bref, et donc le dieu Asclépios nous a aujourd'hui laissé son fameux caducée (bâton) enroulé d'un serpent, le symbole de la médecine. Tiens, pis sa fille Hygie qui nous a transmis l'hygiène nous a aussi laissé sa coupe (la coupe d'Hygie) que vous trouverez sur toutes les bonnes pharmacies vu que c'est leur symbole (le serpent qui crache son venin curatif dans la coupe). Ah oui, et elle avait une soeur Hygie, Panacée, la panne assez unie vers celle... Ah et puis, hein, attends c'est pas le sujet de ma publie, alors retour à la fresque. Ensuite il y a Pythagore, celui-là je ne vous le détaille pas, tout le monde se souvient de son théorème de géométrie euclidienne qui énonce que "dans un triangle rectangle, le carré de l'hypoténuse est égal à la somme des carrés des côtés de l'angle droit". Bon, et là arrive un truc assez curieux. Vous voyez le pilier en dessous duquel est inscrit "Wenceslaus secundus, hic primus", ben en dessous du pilier, à droite, se trouve un groupe d'hérétiques effrayés par la puissance céleste. Ils symbolisent les encyclopédistes français dont la "bible des Lumières", le Dictionnaire raisonné des Sciences, des Arts et des Métiers, venait foutre un bordel sans nom dans la "connaissance" jusque-là sciemment censurée, épurée et souvent rectifiée par l'église (encyclopédie, soit dit en passant et pour la petite histoire, néanmoins en bonne place dans la dite bibliothèque de "Strahov"). Tiens, tu m'étonnes que les curés "Prémontrés" (du doigt) n'aiment pas nos génies. "Il est doux de dominer sur ses semblables; les prêtres surent mettre à profit la haute opinion qu'ils avoient fait naître dans l'esprit de leurs concitoyens..." et puis tiens, non, lisez vous-même, l'article de l'Encyclopédie concerne les prêtres et fut écrit de la main du baron d'Holbach (Paul-Henri Thiry). Par contre, et ça, ça m'agace gravement, je n'ai pas réussi à savoir qui sont les trois bougres sur la fresque. Alors si jamais vous avez l'info, tiendez-moi en courant s'you plait. Je vous donne mon tiercé dans l'ordre, mais vraiment à vue de nez: Denis Diderot, Jean d'Alembert et Voltaire, mais j'y verrais tout aussi bien André Le Breton, Étienne Bonnot de Condillac, le Baron d'Holbach, Montesquieu ou Jean-Jacques Rousseau. Bref celui ou celle qui trouve l'info est invité(e) par votre serviteur à une genou-grillé-bière party dans un des lieux fantastiques dont je ne mentionne jamais l'existence dans mes publies. Ca motive non? :-) Et finalement l'on peut apercevoir dans le fond, le pauvre Socrate en prison, condamné à mort par absorption de ciguë pour hérésie et dépravation de la jeunesse (ah ouais, ben flûte alors, faut faire gaffe parce qu'aujourd'hui ça se lit dans les écoles le Socrate). Pis de l'autre côté, en opposition de Moïse et de son arche, ben je ne sais pas parce c'est sous la porte, invisible de là qu'on peut voir, et qu'on ne peut pas y accéder, mais selon la charmante dame qui surveillait que je photographiais avec l'autorisation qui allait bien, il s'agirait du Saint Patron de la bohême ("Sv. Václav") et d'autres acolytes de cet acabit, "Ludmila", "Vojtěch"...
Bon et pour les anecdotes alors... Ben en 1800, une des premières femmes à avoir visité la bibliothèque fut Lady Hamilton, en compagnie de son époux William et, semblerait-il, de son amant (amant c'est sûr, c'est sa compagnie en l'occasion qui l'est moins, sûre), l'amiral Nelson (Horatio). Puis en 1812, c'est madame l'impératrice Marie-louise d'Autriche (vous savez, celle que notre Napoléon est allé prestement fourrer à Compiègne un soir de mars 1810 n'en pouvant plus d'attendre) qui aura le bonheur de visiter la collection. Puis après il y en aura d'autres des femmes à visiter la bibliothèque, ayant entre-temps appris à lire :-))) Oh purée de bois t'es con là Strogoff, vraiment tu déconnes où quoi? Sans dec, tenir des propos pareils seulement 2 semaines après la journée internationale et mondiale de la femme!
Et puis entre les 2 salles de la bibliothèque, le couloir de jointure, il y a toute une collection de trucs insensés et loufoques, la pièce des curiosités saugrenues, l'"unglaublich wunderkammer". Les objets sont totalement sans le moindre lien avec la bibliothèque, mais ils méritent vraiment le coup d'oeil. Dans une armoire il y a surtout des poissons de mer séchés absolument dingues, je ne savais même pas qu'ils existaient, et dans l'autre armoire, il y des crustacés et une pièce unique en son genre, une "maquette" du dronte de l'île Maurice, le fameux dodo (Raphus Cucullatus) dont j'ai déjà parlé à propos du Musée National. Alors je dis bien une "maquette" parce que si c'est bien ce que m'a montré la charmante dame qui surveillait que je photographiais avec l'autorisation qui allait bien, et que l'on peut apercevoir sur ma photo d'armoire des crustacés, alors ça ressemble à tout sauf à un dodo. Au bout du couloir, la fameuse Xylothèque de 68 ouvrages se rapportant chacun à une essence d'arbre. La couverture des "livres" est faite du bois dont il est question, et à l'intérieur, car il s'agit de boîtes et non de livres, se trouvent des racines, des branches, des feuilles des fruits et accessoirement des parasites de chaque essence. Trop fort.
Puis toujours dans le fond, vous verrez une copie de l'évangéliaire de "Strog... Strahov" dont on estime la parution vers 860. Alors comme dit, c'est qu'une copie, un fac-similé, donc ne vous emballez pas, d'ailleurs il n'y a rien à voir, on ne voit même pas les enluminures. Ensuite à coté de la maquette du bateaux, il y a encore du bric-à-brac capharnaümesquement incroyable: des bottes de cavalerie que la charmante dame qui surveillait que je photographiais avec l'autorisation qui allait bien attribue aux Français. Ils les auraient oubliées (les bottes) lorsqu'ils évacuèrent Prague en 1742 sous la pression des troupes autrichiennes lors de la guerre de succession des Habsbourg. Toujours au même endroit, il y a encore un arc tatar qui date de l'invasion de la Slovaquie au XIV ème siècle, une "valaška" (sorte de hachette typiquement slovaque) que les Tatars utilisaient pour découper leur steaks (tatars) lors de la même invasion de la Slovaquie (au XIV ème siècle), une arbalète et des casques fin XVII ème début XVIII ème siècle dont on ne sait strictement rien, mais qui sont là quand même, deux trompes d'éléphants dont on ignore également la provenance, ce qui fait dire à la charmante dame qui surveillait que je photographiais avec l'autorisation qui allait bien qu'il s'agirait plutôt des restes d'une circoncision rituelle pratiquée dans la tribu africaine des Oulalamat'moissa rapportés (les restes) par l'explorateur tchèque mondialement connu "Emil Holub", et pour terminer une dent de narval que l'on a pendant longtemps présenté comme une corne de rhino féroce.
Donc voilà, j'en reste là, en espérant avoir fait suffisamment court pour la lecture, mais suffisamment long pour vous donner l'envie d'y aller. Et je vais terminer sur une note d'humour très Tchèque, enfin j'en ris maintenant, mais c'est triste dans l'absolu, comportement inadmissible qui mériterait pour le moins un coup de pied au cul... Une fois que mon Simon (prononcez Saillemone, il est Australien) eut abreuvé ses mirettes des beautés de cette fabuleuse bibliothèque, ses rognons le rappelèrent soudainement aux astreintes élémentaires de son corps. L'on décida ainsi d'inviter les WC qui se trouvent sur la droite de l'entrée de l'édifice. "Quoi? 10 CzK pour aller pisser?" s'exclama Simon (prononcez Saillemone, il est Australien) alors que le tarif classique est de 3, maximum 5 CzK. "Attends voir" me dit-il, "je vais demander à la mère pipi si ce n'est pas compris dans le prix du billet d'entrée dans la bibliothèque?" (c'est dingue ça, je n'y aurais pas pensé, visite et vespasiennes tout en un!). Il s'approcha de la vieille avec un air courtois et s'enquit (passé simple du verbe s'enquérir, interroger quelqu'un sur quelque chose) "Do you speak English?" (il est Australien). Et la vielle de répondre du tac au tac en Tchèque "Kek ça peut t'fout' English, 10 couronnes ça s'écrit pareil en English non?" tout en montrant de la main la pancarte format A4 sur laquelle était inscrit en grosses lettres "10 CzK", effectivement en English comme en Tchèque ou en Turc. Ayant approximativement compris la réponse, mais parfaitement bien assimilé le ton urbain de la mégère, Simon (prononcez... Australien) stupéfait me regarda les yeux exorbités, moi plié de rire par la réponse pragmatique de la vipère, et lui cherchant désespérément une aide linguistique afin d'objecter à l'affabilité des paroles. Convulsé de rire par la situation et sentant la totale futilité d'une quelconque réaction, je posais les 20 CzK sur le comptoir, pris mon Simon (prononcez Saillemone, il est Australien) par le bras et le guidais en direction des urinoirs afin d'assouvir le besoin qui nous avait mené ici. J'avoue avoir eu du mal à viser dans la faïence tellement j'en rigolais encore, rire par ailleurs entretenu par l'autre luron qui ne cessait de grommeler et comparer l'attitude souvent impertinente des interlocuteurs tchèques avec celle, engageante, des habitants de son Australie natale. Ben ouais, malheureusement c'est comme ça ici, certains Tchèques sont rustres, aigris, malappris voire primitifs, mais bon, que voulez-vous, c'est pas moi et mon Simon (prononcez Saillemone, il est Australien) qui allons les changer. Laissons le temps au temps. Par contre et surtout, n'en oubliez pas "Strahov", ça vaut le coup... mais pissez avant!
Et comme j'ai lu récemment que les blogs longs ne sont pas lus (ce qui m'étonne, d'autant plus que les miens sont de qualité, les autres je ne dis pas, mais les miens...) je me suis dit tiens, je vais en faire un court cette fois-ci. Puis surtout ça tombe bien, parce que comme je n'ai pas vraiment le temps, ben ça va le faire aussi. Bref, je vais donc vous passer les peintres, les statues, les machins et les bidules, et vous filer des infos que vous ne trouverez pas forcément dans votre petit guide bien fait. Oh puis si, allez rapidement alors, un peu d'histoire...
Bon, la toute première bibliothèque date du début du XII ème siècle. A l'époque c'était encore petit, parce qu'entre les moines qui ne savaient pas écrire, et ceux qui savaient mais qu'il leur fallait 3 ans pour dessiner une page (pas comme moi avec mes publies, oui je sais), donc des livres dans la bibliothèque, il n'y en avait pas velu à se mettre sous l'oeil. Pis au fur et à mesure on commença à n'en mettre du livre, avec l'invention de l'imprimerie (merci à "Johannes Gensfleisch"). Mais pas de chance, les guerres, les hussites, puis les Suédois en 1648... et surtout ce fumier de général Königsmark qui pilla bien proprement et bien systématiquement la bibliothèque (et d'autres) pour emmener tout son butin en Suède, où de toute façon il n'y avait pas un couillon pour lire le Tchèque. Bon je déconne, c'était surtout en Allemand et en Latin que c'était écrit, et ça, les Suédois ils le comprennent quand ils ont de l'élevage.
Allez on passe vite, donc 1950, les con-munistes chassent les curés, 1989 on chasse les con-munistes, et début des années 1990, les Prémontrés (du doigt) récupèrent leur abbaye ainsi que la bibliothèque, qui va avec. Et bien que pillée, incendiée, dévastée, puis non entretenue, elle comporte encore et toujours quelques 200.000 ouvrages, majoritairement du XIV ème au XIX ème siècle, dont quelques 1500 sont des primo-éditions (première édition, ça ne vous dit rien, tiens, regardez voir combien se paye une première édition de Tintin ou d'Astérix aujourd'hui, et c'est pas du XIX ème, voire avant) et 3000 manuscrits (écrits à la main). Et donc quand vous y irez, parce qu'il faut que vous y alliez, vous y verrez 2 salles.
La salle théologique date du milieu du XVII ème siècle. C'est la plus ancienne des deux (salles), et c'est aussi celle que vous verrez en second si vous suivez bien le guide. Bon, pis juste dans le fond, mais vous ne pouvez pas le voir parce que l'accès à la salle est interdit (mais pas pour moi :-) il y a un portail en fer forgé au dessus duquel est inscrit "Initium Sapientiae Timor Domini" (La crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse, "Psaumes", chapitre 110, verset 10). C'est effrayant de connerie! Enfin quoi, n'y aurait-il pas de sagesse sans crainte (du saigneur de surcroît :-) ? Ben voilà, tiens, hop, parti dans la philosophie qu'on est. Bon j'avais prévu de faire court, alors "Gloria Patri et Filio, et Spiritui Sancto... et viva tutti quanti... Amen" et hop, on passe à la suite. La salle est pleine de globes terrestres et astronomiques, genre vous savez, chez Atlas et Monsieur Meuble, que quand vous l'ouvrez, il y a de la place pour les bouteilles de gnole. Ces couillons là, fabricants de meubles pour pauvres qui veulent faire riches, en ont fait du kitch à cent balles, mais à l'époque, au XVII ème siècle, la famille "Blaeu" (n'essayez pas de prononcer, c'est Hollandais, donc imprononçable) avait bâti sa réputation sur ces globes, cartes et atlas, de véritables oeuvres d'art que c'était. Tiens, je vous en ai même trouvé sur la toile du "Blaeu". Pis c'est tout, je ne vous dirai rien de plus. Si, la salle a été entièrement restaurée début 1990 et interdite au public parce que le touriste ça souffle, ça crache, ça tousse, ça mouche, ça renifle, ça transpire, puis ça pète parfois même, et donc ça humidifie empuante tellement la salle que ça bousille les fresques et les ouvrages précieux.
Pis il y a la salle philosophique, ma préférée à moi parce que je la trouve plus belle, et surtout aussi que pour moi, la philosophie par rapport à la théologie... bref ma préférée, plus récente (fin du XVIII ème siècle) que l'autre et la première que vous verrez si vous suivez le guide comme il faut (le suivre). Bon, un truc rigolo, la galerie du dessus est accessible par des escaliers en colimaçon qui sont planqués (des 2 côtés) derrière une rangée de faux livres, essayez de les retrouver :-) La monumentale fresque au plafond représente l'évolution spirituelle de l'humanité, imperceptiblement dans le sens théologique (l'évolution) mais surtout et énormément dans le sens intellectuel du terme. Dans le fond on reconnaît Moïse avec l'arche d'alliance ("Ignoto Deo"), puis plus loin les rois David et Salomon, Noé, Abel et Caïn... et même parait-il (selon la charmante dame qui surveillait que je photographiais avec l'autorisation qui allait bien) Adam et Eve (mais moi je ne les ai pas trouvés, et pourtant ils sont reconnaissables à leur fringues de marque). La parti gauche de la fresque représente l'évolution de la civilisation grecque, jusqu'aux grands philosophes. Ca me va mieux comme thème. Les trois représentés presque au fond, c'est Socrate, Diogène dans son tonneau, et le présocratique Démocrite d'Abdère. Et au milieu de la fresque, toujours sur la gauche, le grand gaillard bien bâti qui regarde son roussin blanc Bucéphale, c'est Alex, Alex le gland... le grand, en compagnie de son percepteur :-) Aristote. Allez on porte son regard sur la droite, et là, on y voit l'évolution de la science. Donc le dieu de la médecine Asclépios ("Aesculapius"), fils d'Apollon et de Coronis, fille unique du roi Phlégyas de Béotie, vous savez, les fameux Béotiens... (ah pour sûr, Apollon n'avait pas choisi la plus intelligente, mais celle qui avait les plus gros nichons, comme toujours :-) Bref, et donc le dieu Asclépios nous a aujourd'hui laissé son fameux caducée (bâton) enroulé d'un serpent, le symbole de la médecine. Tiens, pis sa fille Hygie qui nous a transmis l'hygiène nous a aussi laissé sa coupe (la coupe d'Hygie) que vous trouverez sur toutes les bonnes pharmacies vu que c'est leur symbole (le serpent qui crache son venin curatif dans la coupe). Ah oui, et elle avait une soeur Hygie, Panacée, la panne assez unie vers celle... Ah et puis, hein, attends c'est pas le sujet de ma publie, alors retour à la fresque. Ensuite il y a Pythagore, celui-là je ne vous le détaille pas, tout le monde se souvient de son théorème de géométrie euclidienne qui énonce que "dans un triangle rectangle, le carré de l'hypoténuse est égal à la somme des carrés des côtés de l'angle droit". Bon, et là arrive un truc assez curieux. Vous voyez le pilier en dessous duquel est inscrit "Wenceslaus secundus, hic primus", ben en dessous du pilier, à droite, se trouve un groupe d'hérétiques effrayés par la puissance céleste. Ils symbolisent les encyclopédistes français dont la "bible des Lumières", le Dictionnaire raisonné des Sciences, des Arts et des Métiers, venait foutre un bordel sans nom dans la "connaissance" jusque-là sciemment censurée, épurée et souvent rectifiée par l'église (encyclopédie, soit dit en passant et pour la petite histoire, néanmoins en bonne place dans la dite bibliothèque de "Strahov"). Tiens, tu m'étonnes que les curés "Prémontrés" (du doigt) n'aiment pas nos génies. "Il est doux de dominer sur ses semblables; les prêtres surent mettre à profit la haute opinion qu'ils avoient fait naître dans l'esprit de leurs concitoyens..." et puis tiens, non, lisez vous-même, l'article de l'Encyclopédie concerne les prêtres et fut écrit de la main du baron d'Holbach (Paul-Henri Thiry). Par contre, et ça, ça m'agace gravement, je n'ai pas réussi à savoir qui sont les trois bougres sur la fresque. Alors si jamais vous avez l'info, tiendez-moi en courant s'you plait. Je vous donne mon tiercé dans l'ordre, mais vraiment à vue de nez: Denis Diderot, Jean d'Alembert et Voltaire, mais j'y verrais tout aussi bien André Le Breton, Étienne Bonnot de Condillac, le Baron d'Holbach, Montesquieu ou Jean-Jacques Rousseau. Bref celui ou celle qui trouve l'info est invité(e) par votre serviteur à une genou-grillé-bière party dans un des lieux fantastiques dont je ne mentionne jamais l'existence dans mes publies. Ca motive non? :-) Et finalement l'on peut apercevoir dans le fond, le pauvre Socrate en prison, condamné à mort par absorption de ciguë pour hérésie et dépravation de la jeunesse (ah ouais, ben flûte alors, faut faire gaffe parce qu'aujourd'hui ça se lit dans les écoles le Socrate). Pis de l'autre côté, en opposition de Moïse et de son arche, ben je ne sais pas parce c'est sous la porte, invisible de là qu'on peut voir, et qu'on ne peut pas y accéder, mais selon la charmante dame qui surveillait que je photographiais avec l'autorisation qui allait bien, il s'agirait du Saint Patron de la bohême ("Sv. Václav") et d'autres acolytes de cet acabit, "Ludmila", "Vojtěch"...
Bon et pour les anecdotes alors... Ben en 1800, une des premières femmes à avoir visité la bibliothèque fut Lady Hamilton, en compagnie de son époux William et, semblerait-il, de son amant (amant c'est sûr, c'est sa compagnie en l'occasion qui l'est moins, sûre), l'amiral Nelson (Horatio). Puis en 1812, c'est madame l'impératrice Marie-louise d'Autriche (vous savez, celle que notre Napoléon est allé prestement fourrer à Compiègne un soir de mars 1810 n'en pouvant plus d'attendre) qui aura le bonheur de visiter la collection. Puis après il y en aura d'autres des femmes à visiter la bibliothèque, ayant entre-temps appris à lire :-))) Oh purée de bois t'es con là Strogoff, vraiment tu déconnes où quoi? Sans dec, tenir des propos pareils seulement 2 semaines après la journée internationale et mondiale de la femme!
Et puis entre les 2 salles de la bibliothèque, le couloir de jointure, il y a toute une collection de trucs insensés et loufoques, la pièce des curiosités saugrenues, l'"unglaublich wunderkammer". Les objets sont totalement sans le moindre lien avec la bibliothèque, mais ils méritent vraiment le coup d'oeil. Dans une armoire il y a surtout des poissons de mer séchés absolument dingues, je ne savais même pas qu'ils existaient, et dans l'autre armoire, il y des crustacés et une pièce unique en son genre, une "maquette" du dronte de l'île Maurice, le fameux dodo (Raphus Cucullatus) dont j'ai déjà parlé à propos du Musée National. Alors je dis bien une "maquette" parce que si c'est bien ce que m'a montré la charmante dame qui surveillait que je photographiais avec l'autorisation qui allait bien, et que l'on peut apercevoir sur ma photo d'armoire des crustacés, alors ça ressemble à tout sauf à un dodo. Au bout du couloir, la fameuse Xylothèque de 68 ouvrages se rapportant chacun à une essence d'arbre. La couverture des "livres" est faite du bois dont il est question, et à l'intérieur, car il s'agit de boîtes et non de livres, se trouvent des racines, des branches, des feuilles des fruits et accessoirement des parasites de chaque essence. Trop fort.
Puis toujours dans le fond, vous verrez une copie de l'évangéliaire de "Strog... Strahov" dont on estime la parution vers 860. Alors comme dit, c'est qu'une copie, un fac-similé, donc ne vous emballez pas, d'ailleurs il n'y a rien à voir, on ne voit même pas les enluminures. Ensuite à coté de la maquette du bateaux, il y a encore du bric-à-brac capharnaümesquement incroyable: des bottes de cavalerie que la charmante dame qui surveillait que je photographiais avec l'autorisation qui allait bien attribue aux Français. Ils les auraient oubliées (les bottes) lorsqu'ils évacuèrent Prague en 1742 sous la pression des troupes autrichiennes lors de la guerre de succession des Habsbourg. Toujours au même endroit, il y a encore un arc tatar qui date de l'invasion de la Slovaquie au XIV ème siècle, une "valaška" (sorte de hachette typiquement slovaque) que les Tatars utilisaient pour découper leur steaks (tatars) lors de la même invasion de la Slovaquie (au XIV ème siècle), une arbalète et des casques fin XVII ème début XVIII ème siècle dont on ne sait strictement rien, mais qui sont là quand même, deux trompes d'éléphants dont on ignore également la provenance, ce qui fait dire à la charmante dame qui surveillait que je photographiais avec l'autorisation qui allait bien qu'il s'agirait plutôt des restes d'une circoncision rituelle pratiquée dans la tribu africaine des Oulalamat'moissa rapportés (les restes) par l'explorateur tchèque mondialement connu "Emil Holub", et pour terminer une dent de narval que l'on a pendant longtemps présenté comme une corne de rhino féroce.
Donc voilà, j'en reste là, en espérant avoir fait suffisamment court pour la lecture, mais suffisamment long pour vous donner l'envie d'y aller. Et je vais terminer sur une note d'humour très Tchèque, enfin j'en ris maintenant, mais c'est triste dans l'absolu, comportement inadmissible qui mériterait pour le moins un coup de pied au cul... Une fois que mon Simon (prononcez Saillemone, il est Australien) eut abreuvé ses mirettes des beautés de cette fabuleuse bibliothèque, ses rognons le rappelèrent soudainement aux astreintes élémentaires de son corps. L'on décida ainsi d'inviter les WC qui se trouvent sur la droite de l'entrée de l'édifice. "Quoi? 10 CzK pour aller pisser?" s'exclama Simon (prononcez Saillemone, il est Australien) alors que le tarif classique est de 3, maximum 5 CzK. "Attends voir" me dit-il, "je vais demander à la mère pipi si ce n'est pas compris dans le prix du billet d'entrée dans la bibliothèque?" (c'est dingue ça, je n'y aurais pas pensé, visite et vespasiennes tout en un!). Il s'approcha de la vieille avec un air courtois et s'enquit (passé simple du verbe s'enquérir, interroger quelqu'un sur quelque chose) "Do you speak English?" (il est Australien). Et la vielle de répondre du tac au tac en Tchèque "Kek ça peut t'fout' English, 10 couronnes ça s'écrit pareil en English non?" tout en montrant de la main la pancarte format A4 sur laquelle était inscrit en grosses lettres "10 CzK", effectivement en English comme en Tchèque ou en Turc. Ayant approximativement compris la réponse, mais parfaitement bien assimilé le ton urbain de la mégère, Simon (prononcez... Australien) stupéfait me regarda les yeux exorbités, moi plié de rire par la réponse pragmatique de la vipère, et lui cherchant désespérément une aide linguistique afin d'objecter à l'affabilité des paroles. Convulsé de rire par la situation et sentant la totale futilité d'une quelconque réaction, je posais les 20 CzK sur le comptoir, pris mon Simon (prononcez Saillemone, il est Australien) par le bras et le guidais en direction des urinoirs afin d'assouvir le besoin qui nous avait mené ici. J'avoue avoir eu du mal à viser dans la faïence tellement j'en rigolais encore, rire par ailleurs entretenu par l'autre luron qui ne cessait de grommeler et comparer l'attitude souvent impertinente des interlocuteurs tchèques avec celle, engageante, des habitants de son Australie natale. Ben ouais, malheureusement c'est comme ça ici, certains Tchèques sont rustres, aigris, malappris voire primitifs, mais bon, que voulez-vous, c'est pas moi et mon Simon (prononcez Saillemone, il est Australien) qui allons les changer. Laissons le temps au temps. Par contre et surtout, n'en oubliez pas "Strahov", ça vaut le coup... mais pissez avant!
Commentaires
merci pour le post
et la dame pipi.. on s'y croirait!
peut-on visiter la salle de théologie?
Mon seul essai a été plus que frustrant je suis restée quelques instants devant la porte de la salle interdite et j'ai dû laisser ma place aux autres visiteurs qui voulaient aussi voir la merveille. j'ai trouvé ça limite et je n'y suis jamais retournée.
Merci
Bon dimanche