Insolite: Faire du canoë en Tchèquie

Ah ben ça, hein, je vous l'avais promis dans une publication que j'allais vous en parler, alors pourquoi pas aujourd'hui, vu que c'est encore l'été et que justement il s'agit d'une activité à pratiquer l'été de préférence. Encore qu'il suffit juste qu'il fasse un peu chaud et un peu beau, et hop, c'est praticable comme activité donc pas forcément que l'été. Et qu'est-ce que c'est alors que c'est dont il s'agit?
Ben c'est le canoë, la descente de rivières tchèques en canoë. Et comme dit, c'est un truc à ne pas manquer pour peu que vous soyez sur place (en Tchéquie) quelques jours. Pour sûr, en voyage d'affaire ça ne va pas le faire, mais si vous êtes en congé, vous devez essayer.

Ma chérie d'amour m'avait informé plusieurs mois auparavant qu'elle, de toute façon elle irait, comme chaque année avec sa bande joyeux drilles, et que si je voulais, elle m'emmènerait avec elle et plaisir. Cependant connaissant l'attraction qu'exerce sur moi la nature, elle n'insista pas. Je réfléchis quelques jours, puis finis par donner ma réponse positive 2 semaines avant le départ. Oh pétard! Je me suis dit qu'après avoir survécu la "Soča" en raft et en Slovénie (du côté de "Bovec", à quelques kilomètres de la frontière italotrichienne) l'année dernière, après survécu ce torrent de quelques +2°C (néoprène complet indispensable) dévalant tout droit des Alpes à la fonte des neiges (mois de mai), après avoir survécu l'hébergement sous tente en camping à 2000 m d'altitude par -4°C, donc après avoir survécu à tout ça, je me suis dit qu'une descente de rivière en plein été en canoë, c'était de la confiture de quetsche à mèmè sur tartine grillée-beurrée. Ben oui mais non, enfin pas tout à fait. Maintenant je vous rassure chers lecteurs, j'en suis reviendu indemne et sans séquelles. Grande expérience cependant pour l'amoureux fou de la nature que je suis, et qui ne s'y rend qu'exceptionnellement afin de la préserver de la dégradation et de la pollution humaine.

Avant de partir, ma délicieuse chérie avait pris soin de m'acheter l'indispensable sac à dos hermétique dans lequel je pouvais entasser quelques 60 litres de bordel à moi, ce qui me semblait de prime abord suffisant pour 4 jours de croisière à la rame.
Mais lorsque j'essayai d'y entasser tout le foin que j'avais initialement prévu, je dus me résoudre à trier sévèrement mon fourbi afin de n'emmener que le strict minimum. Dingue, 60 litres ça semble confortable à vue de nez le doigt au vent, mais même après avoir tassé bourré pressé ce foutu sac, la moitié de mon barda restait en dehors. Bon, ben hop, hein, à la campagne comme à la guerre, je serai cradodégueu pendant 4 jours pis c'est tout. Le problème d'ailleurs vient plus de l'incertitude météo d'en ce moment que de vouloir faire la précieuse maniérée. Je n'avais aucune intention d'emporter un vanity case et des robes de soirées à talons aiguilles, mais aujourd'hui vous devez compter avec des écarts de température de 20°C d'une journée à l'autre. Et croyez-moi qu'avec des sandales Jésus, un maillot de bain léopard et un t-shirt sans doublure, quand il ne fait que 13°C, le tout mouillé de surcroît... Bref, je laissai avec amertume mes 3 fourrures polaires en kevlar, mes 7 chemises hawaïennes Gore-Tex, mes 5 pantalons molletonnés, mes pantoufles fourrées de Charente, mes rollers, mes skis, mon surf des mers, mon parapente des airs, mes boules de pétanque (des terres), et mon gros doudou-p'luche Teddy-Fifounette pour n'emporter que l'indispensablement nécessaire.

Ah oui, alors le sac hermétique fait partie de ces choses indispensables dont vous aurez besoin, parce que vous allez bien entendu tout mettre dans le canoë et tout transporter dedans. Et quand bien même seriez-vous David Croquette en personne, il n'est pas exclu que vous vous fichiez à la baille au moins une fois. Des trucs hermétiques, j'en connais de 2 types. Vous avez donc les fameux sacs dont je vous ai parlé (où qu'y a rien qui rentre dedans), et dont je conseille un grand (60 à 80 litres) pour les fringues, et un petit (3 à 5 litres) pour les téléphones, clopes, appareils photos et argent de poche.
Les seconds sont des tonneaux en plastique de capacité supérieure aux sacs, et qui sont rudement appropriés pour les tentes, sacs de touchage, BBQ (barbecue), et autre bazar volumineux. Par contre ils sont hyperépouvantablement chiants à transporter. Dernière recommandation concernant le transport: bien qu'hermétiques, les sacs comme les tonneaux parfois flottent, puis parfois non, ça dépend. Et comme il est fort à parier que vous allez vous fiche à l'eau dans un endroit où qu'il y a du courant et du remous (sinon vous êtes vraiment l'empoté de base), je vous conseille fortement de fixer tout ça au canoë (cordes, ficelles, tendeurs, soutif à mémé...) car celui-là (canoë) vous le retrouverez toujours (sinon vous êtes vraiment l'empoté des empotés de base). Et tiens, tuyau de dernière minute, si jamais vous n'avez ni sac ni tonneau hermétique parce que vous êtes partis sur un coup de tête
(ou de coeur), à la dernière minute donc, vous pouvez mettre les objets de valeurs et lectroniques (téléphone, appareil photo...) dans des préservatifs, un noeud au bout... J'veux dire faites un noeud au bout du présa, et hop le tour est joué, ils sont à l'abri, les objets. Attention, c'est à usage unique car vous n'arriverez jamais à défaire le noeud sans altérer l'étanchéité du caoutchouc. Derniers conseils, évitez les présas lubrifiés et prenez le format "Afrique Centrale" pour mettre la téloche. A priori et gros avantage, vous trouverez des condoms dans n'importe quelle station essence sur la route, ce qui n'est pas le cas des sacs à dos ou tonneaux hermétiques qui ne sont disponibles qu'en magasin spécialisé dans l'équipement nautique.

Pis tiens, encore quelques conseils sagaces issus de mon expérience et inexpérience personnelles. Emmenez un couteau multifonction (suisse, mais pas forcément) pour les conserves, les bouteilles plastiques récalcitrantes et les morceaux de bidoche grillés au feu de bois. Quand bien même la température climatique viendrait subitement à se tropicaliser en permanence, emportez un pantalon long et un sweet-shirt à manches longues.
Ces fumiers de mouches, moustiques, guêpes, tiques, parasites volants, rampants, courants, roulants, grinçants, emmerdants sont omniprésents de jour comme de nuit, alors croyez-moi vous serez heureux d'être équipés en conséquence afin d'éviter les grattages. Attention, cela ne vous protégera que des grattagacements car les bestioles vous piqueront quand même malgré vos vêtements (elles sont rusées les salopes), aussi pour être totalement protégé je vous invite à vous munir d'une bonne bombe insecticide (prenez le format familiale), d'une crème répulsive (500 gr), une autre pour atténuer les piqûres (inévitables, 200 gr), et de l'encens "fous moi l'camp sale bête" pour les soirées (5 kg, chez tous les bons Pakistanais du coin de la rue). Prenez suffisamment d'argent liquide, les bleds que vous traverserez n'auront pratiquement jamais de guichet automatique. Soyez le plus autonome et indépendant possible, ne comptez sur personne pour vous transporter vos affaires ou vous les mettre dans leurs fourbis hermétiques, ils seront pleins. Prévoyez un matelas de camping (autogonflant c'est top) sous votre sac de touchage, c'est indispensable compte tenu du sol souvent froid, humide (même en plein été) et toujours dégueulasse. Emportez suffisamment de papier AQ, plusieurs rouleaux, car vous n'en trouverez jamais, nulle part. Une bonne paire de bretelles (ou une ceinture) est également conseillée afin de maintenir la porte des goguenots fermée. C'est une spécialité tchèque extrêmement à la mode que de ne pas mettre de clé ou de loquet sur la porte des toilettes (90% des chiottes). Or lorsque celle-ci (porte) se trouvera à 1,5 m de distance (dans la moitié des cas), vous verrez que les bretelles sur la poignée tenues d'une main seront d'un grand secours. Equipez-vous contre la pluie, parka, ciré, imperméable ou coupe-vent. Prévoyez lunettes de soleil et couvre chef. N'oubliez pas une lampe torche et des tongues (flip-flop, sandales...) pour marcher dans l'eau (à cause des merdasses occasionnées par les inondations).

Cette année, la cible était la rivière "Ohře" ("Eger" en Allemand). Elle prend sa source en Barbarie (Bavière), près de "Weissenstadt", dans le parc naturel de "Fichtelgebirge", à une vingtaine de kilomètres de la frontière, puis traverse les villes de "Cheb", "Karlovy Vary", "Klášterec nad Ohří", "Kadaň", "Žatec", "Louny", "Terezín" (camp de concentration nazi lors de la GM II) et se jette dans l'Elbe au niveau de "Litoměřice". Et bien que la rivière soit longue de quelques 250 kilomètres (sur le territoire tchèque), notre périple ne fut que de quelques 50 km, même moins en ce qui me concerne moi, personnellement. En fait la bande de furieux de la flotte (dont ma chérie) était partie quelques jours avant, car je devais assurer un minimum de service au bureau, aussi nous nous donnâmes rendez-vous au camping nautique de "Loket" quelques jours après. Super, ouais! J'étais excité comme un gosse à l'idée de dormir à la belle étoile (éventuellement sous une tente en cas de pluie) et manger avec les mains. Et c'est en bus que je quittais ma belle ville de Prague en fin d'après-midi pour "Karlovy Vary", où m'attendait la délicieuse "Nina" qui avait promis de me conduire dans sa voiture jusqu'au lieu de rendez-vous (à 12 km de là), quel amour cette belle enfant.

Les autres m'attendaient déjà sur place à la buvette (genre de kiosque à peine amélioré), et hop, premier réflexe indispensable, aller se chercher une bière. J'eus de la chance, un des membres du groupe passait commande aussi je n'eus point besoin de faire la queue d'un bon quart d'heure et d'une bonne quinzaine de bonnes personnes. Alors voilà, je vous le dis sans détour, la bière était immonde parce que chaude. Eh oui, l'éternel problème des gros débits. Le camping débordait de tentes, donc de canoéistes assoiffés et la tireuse à bière chauffait comme une carte de crédit en période de soldes.
La cuisine était immonde itou, la "sekaná" (genre de viande hachée en meat loaf qu'on coupe en tranche comme une miche de pain) dans son bun (pain à hamburger) sucré finirent dans la poubelle (pourtant j'adore la "sekaná", et d'habitude elle est très bonne). Bon, ben tant pis, hein. On alla se coucher raisonnablement, car le lendemain l'on devait pagayer. Nous dormîmes à la belle étoile entre 2 tentes, sur un tapis de sol et dans un sac de touchage, et je dois avouer avoir bien dormi. Vraiment bien dormi, à l'air frais, emmitouflé dans mon sac. Réveil vers 7:30, chauffage de l'eau, puis thé, café, tranche de pain, cigarette et caca. Ben oui, moi c'est comme ça, avant d'entamer une journée, et surtout lorsque je sais que je ne vais pas pouvoir quand j'en aurai envie, ben je prévois à l'avance. Aussi je récupérai le rouleau de papier qui va bien et que belle maman avait pris le soin d'emporter par précaution et m'en dirigeai d'un pas allègre vers l'emplacement qui me fut indiqué. En passant je saluai poliment les occupants de la tente d'à côté qui venaient d'en sortir, et reçu pour toute réponse des regards acerbes en provenance de faciès fripés comme cul de singe. Bon, ben pas grave, ils n'ont sans doute pas encore été non plus, hein, ou alors j'ai mauvaise haleine? Remarque oui, pour sûr que je devais avoir mauvaise haleine, mais je n'allais quand même pas me brosser les dents avant mon caca matinal non plus, pis si ces corniauds constipés doivent faire la gueule à tout ceux qui en puent de, ils vont finir par choper des crampes ou en faire un métier. Andouilles!

Et tandis que je m'en acheminais vers la cahute indiquée, mon reniflard fut saisi par une odeur épouvantable, un bouquet gazeux d'excrément, de vomissure, d'urine humaine et animale, de putréfaction nécrosée, le tout fermentant joyeusement depuis une paire d'années.
"Ah oui, bien sûr" me dis-je alors que j'aperçus un pauvre bougre à genoux en train de malaxer à l'aide d'un bâton quelque chose au fond de ce qui ressemblait à une cuve en béton, "les chiottes sont bouchées, c'est cela oui...". Et tout en m'apitoyant sur l'infortuné, je remarquai une demi-douzaine de gaillards devant une cahute, tenant à la main l'indispensable rouleau de papier. "Quoi? C'est une blague, un mauvais rêve, j'le crois pas, il doit bien y en avoir d'autres quelque part?" Eh bien non, il n'y en avait pas ailleurs, rien d'autre que ces 2 pauvres malheureux chiottes pour tout le camping, qui ce matin là, était aussi plein que la précédemment décrite cuve à bonheur. Et tout en me rangeant dans la queue, je commençais sincèrement à regretter la civilisation. Certains lurons plaisantaient, genre "t'inquiète, il en a pour 1 minutes, il ne va pas se faire chier avec", ou encore à l'attention d'un assis, "eh machin, y a ta femme qui te cherche, tu fais quoi?". Moi je n'avais pas envie de rire, mais de... et ça commençait à devenir fichtrement pressant.
D'autres désespérés quittaient la file qui s'agrandissait derrière moi, et prenaient un pas militaire en direction de la forêt. Ben tiens, why not après tout, c'est biodégradable le rebut qui sort des boyaux, pis ça va faire plaisir aux mouches, aux vers et aux écureuils des bois (ah? Et pourquoi?). Sauf que c'est un truc à se faire dans le calebar, sur les pompes ou se faire bouffer le dargeot par des bestioles coprophages qui pullulent sur le sol des sous-bois. Je le sais, je l'ai lu dans une revue scientifique sur la nature et les bestioles coprophages qui pullulent sur le sol des sous-bois pour bouffer le dargeot des imprudents. Sans parler de la grand peine que je risquais de faire à ma British nanny qui passa plusieurs années à m'enseigner les bonnes manières britanniques. Non, je pouvais me faire dessus en ultime option, mais en aucun cas je ne pouvais m'échapper dans les fourrés pour m'accroupir et déféquer fion au vent tel la bête primitive.
Et je serrais encore plus les fesses comme un dromadaire dans une tempête de sable, m'en tracassant l'encéphale à cogiter sur ce que je pouvais bien faire pour remédier à cette maudite situation. Soudain la file avança. Oh pas tant que ça, mais suffisamment pour me redonner de l'espoir. Au bout d'une vingtaine de minutes, qui à l'époque me semblait être une éternité, mon tour arriva. Je me précipitai dedans la cabine, me déculottai et... bon, ben vous imaginez la suite. C'est après que j'eus repris mon souffle, qu'à nouveau l'odeur épouvantable, le bouquet gazeux... vint chatouiller mon blaze. Ah ben forcément, comme la tireuse à bière la veille au soir, les chiottes n'avaient pas le temps de refroidir ce matin, et la faïence chauffait grave. "Mais comment certains gars pouvaient-ils bien rester 10 minutes dans cet immonde cloaque?" me demandai-je? Je quittai le lieu au plus vite, et m'en allai rejoindre le groupe. Bizarrement pourtant, alors que j'étais à une centaine de mètres des latrines, l'odeur nidoreuse persistait. Lorsque je m'enquis auprès de mes compagnons s'ils sentaient également, ils m'expliquèrent que l'odeur venait en fait du cours d'eau, que quelques jours auparavant, du lisier s'était écoulé par accident dans la rivière sur laquelle nous allions voguer, mais que ce n'était pas nocif pour la peau. Ah bon? Du coup j'étais vraiment rassuré. Remarquez qu'avec tous les pneus, bouteilles plastiques, immondices rouillés, carcasses de n'importe quoi, ordures variées, et bout de cabanes déposés sur les berges par les flots déchaînés lors des inéluctables inondations annuelles, la pisse de vache et la crotte porcine ne pouvaient pas être vraiment plus nocives. Ca se trouve, c'est même bon pour la peau, eh, qui sait? :-)

Avant de quitter le camping, nous décidâmes encore d'aller visiter le village et le château de "Loket". Les 2 sont splendides, mais j'y consacrerai une publication entière à l'occasion. En début d'après-midi, nous nous restaurâmes dans le "Švejk restaurant" de la chaîne nationale des restaurants "Švejk restaurant". Alors surtout, mais alors surtout et plus que tout n'y allez pas! Celui de "Hluboká nad Vltavou" n'était pas mal, on y avait bu (mais pas mangé) et tout était correct. Mais le "Švejk restaurant" de "Loket", c'est effroyable. C'est mauvais, c'est insipide, c'est pas bon, c'est cher, c'est long (1:20 pour être servi), c'est à éviter, c'est à fuir, et c'est à faire savoir afin que plus personne ne mette les pieds dans ce bouge indécemment infecte.

En mettant les embarcations à l'eau, ma tendresse d'amour me demanda, un sourire en coin, si je me souvenais de la nuit, tandis que je dormais. Ben non. Forcément vu que je dormais, ben tiens. Il semblerait que les voisins de la tente d'à côté, seraient venus en pleine nuit essayer de me retourner sur le flanc, car il aurait semblé que sur le dos j'eus ronflé!?!? Ah ouais!? Ah bon? Non, je ne m'en souvenais pas. Elle, elle est habituée ma chérie. D'ailleurs si je ronfle c'est pour qu'elle sache que je suis là, à ses côtés, pour la rassurer que je n'ai pas quitté la couche conjugale pour une autre. Et du coup, alors que les autres bougres tentaient vainement de me réduire au silence, elle s'était emmitouflée dans le sac de couchage pliée de rire faisant semblant de pioncer. Ah ben voilà, ça explique leur comportement aux voisins de la tente d'à côté, ce n'était pas à cause de mon haleine qu'il faisaient la gueule. Oh pis hein, tant pis, qu'est-ce que tu veux, j'y peux rien si je ronfle, encore que ce n'est même pas sûr puisque je ne m'en souviens pas. Bref...

Alors avant de monter dans un canoë, ici en République Tchèque, il est des règles et vocables nautiques à connaître absolument et sans lesquels vous ne pouvez pas vous aventurer sur l'eau sans passer pour la plus grasse des andouilles à couenne de courge. Ces règles et vocables m'ont été douloureusement enseignés à la lueur des chandelles par ma chérie d'amour à mon retour du bureau lors des rigoureuses soirées d'hiver, au détriment de l'habituel schlouky-schlouky pouêt-pouêt tralala. Je vous les livre accompagnés de mon expérience acquise dans ce milieu particulier des canoéistes. Apprenez-les soigneusement si vous voulez pagayer en Tchéquie.

Ahoj - prononcez ahoy à l'anglaise, salut maritime. Signifie d'ailleurs salut, sur l'eau comme sur terre (en Tchéquie et Slovaquie seulement). A hurler sans faute le plus fort possible à chaque croisement de canoë, kayak, planche à voile, radeau, pirogue, gondole, galère, yacht, péniche, paquebot, chalutier, bateau louche, baleinier, bref, au croisement de tout ce qui flotte quand bien même serait-ce une enclume sourde et muette.

Háček - crochet en Français. Pagayeur, bête de somme, pauvre bougre et véritable moteur assis à l'avant du canoë dont la fonction première est de se taire et pagayer comme un nègre galérien selon les ordres du barreur. Le crochet en outre annonce les obstacles sournois (caillasses, hippopotames...) qui se cachent invisiblement sous les méandres de l'eau, et que de toute façon le barreur n'aura pas le temps d'éviter ce qui lui donnera une bonne occasion de pousser une gueulante musclée parce que le forçat n'aura pas fait son boulot. Le savon se termine généralement par "tais-toi, fais gaffe et rame!".

Jez - barrage. Généralement petite chute d'eau provoquée par un obstacle sur toute la largeur de la rivière. Ce barrage peut être lié à la présence d'une centrale hydraulique, d'une meute de castors canadiens, ou peut se trouver là sans la moindre raison. D'une hauteur moyenne de 2 à 5 cm, il représente un danger maximal nécessitant que le barreur se lève debout sur l'embarcation afin d'apprécier sa navigabilité, le crochet n'ayant pas suffisamment d'expérience. A ce moment là, il est essentiel que celui-ci (le crochet) cesse de pagayer et qu'il maintienne l'équilibre du canoë. Défense absolue de beugler "Ahoj", de chasser les guêpes, se gratter les roustons, se retourner vers son barreur pour voir s'il n'est pas enfin assis, bref ne strictement rien faire jusqu'à ce que le barreur ne prononce les mots magiques "pagaye", "rame plus fort" et "du nerf faignant".

Kontra - contre en Français. Consiste à pagayer en contre sens, c'est-à-dire d'arrière en avant. Ce geste n'est à faire que sur ordre du barreur qui lui seul sait où il veut mener son embarcation. Généralement l'ordre "kontra" est suivi par "vite vite" et "rame plus fort faignant" car le crochet n'aura pas annoncé à temps (ou du tout) l'obstacle qui justement nécessite cette manoeuvre.

Kormidelník, Zadák - barreur, l'arrière en Français. Désigne le conducteur, le cerveau, la tête pensante, le donneur d'ordre et distributeur d'engueulade, bref l'élément indispensable à la bonne marche de l'embarcation.
De part sa position idéale sur le canoë (à l'arrière), il est à même d'apprécier pertinemment tous les gestes du crochet, en l'occurrence son assiduité à pagayer et sa diligence à appliquer un ordre. Son rôle unique est de diriger le canoë, et de part cette fonction comme de sa localisation (arrière) sur l'embarcation, il lui arrive fréquemment de ne pas ramer, généralement à chaque fois que le crochet se retourne.

Peřeje - remous formés à la surface en eau peu profonde par la présence dans le lit de la rivière d'objets divers tels que cailloux, galets, pneus, boîtes de conserves rouillées... Souvent le niveau de l'eau à cet endroit est plutôt faible, et il est important de judicieusement choisir son passage afin de ne pas se retrouver à sec. Si cela vous arrive, vous devrez alors tous les 2 sortir du canoë, et tirer cette fois tout seul l'embarcation en des eaux plus profondes que le barreur sera en train de chercher.

Přitáhnout - ramener, consiste a planter la rame loin du bord du canoë puis ramener l'embarcation (comme la rame) l'un vers l'autre. Cette manoeuvre est uniquement réservée au crochet et permet de faire changer le canoë de direction particulièrement rapidement. Curieusement, alors que c'est au barreur de diriger l'embarcation, celui-ci hurlera souvent cet ordre afin d'éviter un obstacle au dernier moment. Généralement cet ordre est suivi quelques secondes après par une volée d'avoine crue, genre "eh ben voilà, t'aurais ramené plus fort on l'aurait évité. Fais gaffe aux obstacles, rame plus fort et tais-toi."

Porcelán - porcelaine, nom de l'éventuel 3 ème passager assis au milieu de l'embarcation. Son rôle est accessoirement de pagayer (second crochet) mais surtout de maintenir l'équilibre de l'embarcation, ce qui n'est pas chose facile, croyez-moi. Une porcelaine adroite est à même de faire passer à ses coéquipiers les cigarettes, les bouteilles de gnole et tout ce dont ils auraient besoin, sans faire chavirer le canoë. C'est d'ailleurs la seule raison pour laquelle la porcelaine est acceptée à bord.

Soulodit - vient du préfixe "sou" (avec, ensemble) et du suffixe "lodit", "lod'" signifiant bateau, et "lodit" faire du bateau, bateauer (ben on dit bien gondoler, caboter, chalouper, radoter et canoë, alors pourquoi pas bateauer?) donc "soulodit" c'est faire du bateau ensemble. Mais ça vient surtout du jeu de mot avec "souložit" qui signifie copuler, alors forcément, ça fait marrer. Bref, ça consiste lorsque la rivière le permet, lorsqu'elle est d'huile ("olej"), de tenir tous les canoës ensemble (avec les mains) et de se laisser porter par le courant en grappe de canoës. Cela se pratique autant avec ceux qu'on connaît, qu'avec ceux qu'on ne connaît pas (après avoir hurlé "AHOJ" sinon vous n'êtes pas un "Vodák", mais une andouille). C'est l'occasion d'allumer et d'échanger des cigarettes avec ceux qui n'en ont pas mais qui fument quand même (la grande majorité), et faire tourner les bouteilles de gnôle, que chaque vrai "Vodák" aura emporté sur son embarcation (la grande majorité). Si vous voulez "en être", pas faire le "boulet mou du gland", alors il est indispensable de se jeter une goulée au goulot de chaque bouteille qui vous passe dans les mains, au risque de choper virus, bacille et herpes (encore qu'avec l'alcool, les risques sont limités.
Moi je m'en fiche, chuis pas sensible à l'herpes). Inutile de vous dire qu'à ce rythme, une bouteille de 75cl de "domácí slivovička" vous fera à peine l'après-midi. Et donc en comptant le beau soleil qui cogne, les X lampées de gnôle, le mélange des alcools d'avec tout ce qui passe par la main du long de la rivière, vous comprendrez rapidement que "soulodit" fatigue nettement plus que "souložit", même avec l'ours blond homo des plaines de Sibérie.

Udelat se - se faire, encore une expression croustillante sexuellement orientée. Employée tout simplement lorsque cet incompétente andouille de crochet fait chavirer l'embarcation. Bien que le canoë ne coulera pas, il sera rempli d'eau et vous devrez regagner la berge afin de le retourner et le vider complètement. Compte tenu du poids de l'eau dans le canoë, vous n'aurez aucune chance de réaliser cette opération dans la rivière, alors pour "vous faire" choisissez un endroit peu profond, peu large, avec une berge accessible et sans orties, conseil vraiment utile, genre.

Vodák - canoéiste, encore que ce n'est pas exactement le sens car trop spécifique au canoë. "Vodák" vient de "voda", eau en français, et donc les mots eautiste ou flottiste seraient les plus proches s'ils existaient. Le "vodák" est un furieux de la descente de rivières qu'il pratique régulièrement depuis sa plus tendre enfance, mais pas forcément (et généralement vraiment pas) à un niveau "compétition".
On pourrait comparer les "vodáky" aux joueurs de boules, vous savez, pas ceux qui font des compètes internationales, mais ceux qui y jouent depuis 20 ans avec un pastis à la main lors des grandes vacances au camping de la Plage (soit 1 fois par an), et qui vous expliquent comment qu'il faut tirer ou pointer parce qu'ils ont l'expérience. A signaler que pour être "vodák", comme pétanquiste, il n'est pas nécessaire de savoir nager mais boire, boire le matin, boire en journée et boire tous les soirs en quantité ahurissante car ne nous leurrons pas, l'activité accessoire n'est que prétexte à beuverie redoutable.

Bon, ben avec ça, vous êtes prêt à attaquer toutes les rivières attaquables de la République Tchèque, et croyez-moi, il y en a. Maintenant comme dit, le truc 100% coton, c'est de trouver le moment idéal, c'est-à-dire le temps idéal, la rivière idéale, et les gens idéaux. Ah si encore, connaissez-vous la différence entre une rame et une pagaie?
"Moi m'sieur, moi m'sieurs je sais..."
"Vas-y mon petit, je t'écoute..."
"Ben la rame c'est pour ramer, et la pagaie pour pagayer."
"Ah c'est malin, t'es fier de toi cancre?"
Alors selon le dictionnaire de l'Académie Française, 8 ème Edition, 1932 (je l'aime bien celle-là), la pagaie est une petite rame à large pelle ovale, dont les naturels de certains pays se servent pour faire voguer leurs pirogues, et les Européens pour manoeuvrer les périssoires. Tandis que, toujours selon la même source, la rame est une pièce de bois en forme de pelle qui sert à manoeuvrer une embarcation. Il (terme) s'emploie surtout en parlant de la navigation sur les rivières, les lacs, pour la navigation sur mer, on emploie de préférence son synonyme aviron.
On se sent vachement plus instruit avec de pareilles définitions, donc considérez que si vous êtes un Européen vous utilisez une rame en rivière, un aviron en mer, et si vous êtes un naturel (primitif par exemple), vous utilisez une pagaie. Donc en gros, une rame et une pagaie c'est identique, mais selon l'utilisateur c'est pas pareil.

Au retour du village de "Loket", en début d'après-midi, nous pliâmes les tentes, et emmenâmes nos effets dans une des voitures d'accompagnement. Eh oui, parce que curieusement, il y avait 2 voitures d'accompagnement qui faisaient tous les jours la navette de quelques 15 à 20 km pour emmener nos effets du point de départ vers le point d'arrivée. Du coup les sac à dos hermétiques se révélèrent inutiles, mais bon, ça on ne le savait pas à l'avance (enfin pas moi). La première étape pour un débutant comme moi, encore que j'ai eu l'occasion de faire du canoë dans ma jeunesse, mais ça remonte un peu, et donc contrairement au vélo qui ne s'oublie pas, la première étape fut de monter dans l'embarcation lorsqu'une moitié était dans l'eau, et l'autre sur la berge. C'est dingue comme c'est instable ce bataclan. On se rend vite compte que c'est un truc de sauvage, la chose qui n'a pas été calculée par ordinateur pour une stabilité optimale. Une fois sur l'eau, c'est toujours tout aussi instable, sans dec, il suffit de changer de bord de pagayage, se rasseoir au milieu, ou se gratter les fesses, et hop, le truc commence à tanguer ce qui a pour effet d'appeler une réprimande du barreur à mon encontre car vous l'aurez compris, j'étais le crochet-boulet et ma chérie d'amour le capitaine à bord. Bon, puis au bout de quelques minutes je m'y suis fait, au tangage comme aux réprimandes, puis au fur et mesure il y avait moins de tangage, moins de réprimandes et hop, nous naviguions en père peinard sur la grande marre des canards...

Le soir, arrêt sur les berges du côté de "Karlovy Vary", et cette fois-ci pas de dodo en tente car le camping était complet, mais dans des dortoirs, vraiment en forme de dortoir, genre les murs en préfabriqué carton-pâte (cf. mes photos). Evidemment en arrivant le soir il n'y avait plus d'eau chaude, ni froide, que de la glacialadonf. Après un restaurant chinois le soir, une promenade sur la colonnade tard le soir (à laquelle je ne participais pas), après un réveil et une douche chaude cette fois-ci, après une autre promenade sur la colonnade toute la matinée (à laquelle je ne participais pas non plus), nous partîmes enfin. Ouais, super, enfin quand même... Je laissai comme d'habitude mon appareil photo et quelques menus effets dans la voiture qui restait sur place et qui nous rejoindrait le soir, et hop, canoës à l'eau et "rame faignant".

A un moment, tandis que nous étions en train de "Soulodit" en grappe, nous passâmes devant la ville thermale de "Kyselka". Effrayant, épouvantable, horrible et tragique: c'est en ruine. Les thermes, connus depuis le XVI ème siècle et dont la renommé devint mondiale au XVIII et XIX ème siècle, sont en ruine. Quel cauchemar, de splendides édifices, majestueux, et tout le complexe tombe en ruine, comme une ville fantôme du far-west. C'est à chialer, sans dec, et je peux vous dire qu'en naviguant à côté on avait tous la larme à l'oeil, devant les palissades en bois portant mentions "fermé", "défense d'entrer", "risque d'effondrement"... Ayant laissé mon appareil photo dans la voiture, je ne vous ai pas fait de clichés, de toute façon on était loin, sur l'eau, mais je vous ai trouvé le site officiel de la commune qui se désole également de l'état de sa station thermale photos à l'appui.
Puis je vais en rester là, car "Kyselka" mérite une publication à elle toute seule, alors un jour, quand j'aurai le temps et des photos à moi que j'aurai prises...

En fin d'après-midi nous arrivâmes dans un camping près de "Radošov", curieusement assez vaste et non archi-bondé, mais l'explication de la raison du pourquoi en fut assez simple: il n'y avait pas d'eau. Rien, pas un seul robinet, pas une seule douche, bref, la misère totale en matière d'hygiène corporelle. "Ah bon, on va dormir ici?" demandais-je. Et effectivement, on allait dormir ici. De plus on m'informa d'un changement de programme, que la voiture restée dans le camping précédent et contenant (entre autre) mon appareil photo n'allait pas arriver, du coup pas d'image à vous montrer, super, merci les gars, z'avez pris la bonne décision.
Top moumoune. En fait, la voiture tant attendue n'arriva que le dernier jour, alors forcément j'ai loupé plein de belles prises, et donc j'ai demandé à ma chérie de me prêter quelques photos pour documenter ma publie. Bon, retour au camping de "Radošov".

L'orage approchait, le bon orage qui va bien, avec un ciel noir comme des pieds, aussi nous nous dirigeâmes prestement vers l'unique restaurant du patelin. Grande chance que de trouver de la place pour 12 personnes dedans, car heureusement les autres qui n'avaient pas vu l'orage approcher subrepticement se trouvaient dans le jardin, à l'extérieur. Bon, je vous le fais rapide, la bière OK, "Gambrinus", fraîche comme il faut, mais l'attente énorme (1:30, y avait du monde) et la bouffe catastrophique. Je n'aurais jamais cru que l'on puisse bousiller des "knedlíky s vejcem" (Knedlík mélangés à des oeufs), le truc bête à faire que n'importe qui doit réussir, ben non, là pas eux.

Le lendemain matin, après un sommeil correct dans la tente d'un co-canoéiste car la belle étoile n'était point possible avec les trombes d'eau qui furent tombées, nous passâmes au p'tit-dej, et comme à l'accoutumée je m'en allais faire, de façon à ne plus avoir à m'en soucier plus tard. Oh pour sûr je ne m'attendais pas à du 5 étoiles, mais ça, en 2006, alors qu'on a marché sur la lune et enterré Dalida, sans dec là, c'était le couronnement du bouquet. Alors que je me dirigeai vers les aisances en suivant la pancarte WC, je remarquai une dame devant moi qui s'avançait dans la même direction, le fameux rouleau de feuilles roses à la main. "Ben flûtes alors, j'espère qu'il y en a plusieurs, sinon je vais devoir faire la queue, comme la dernière fois." Nous arrivâmes devant une cahute en bois composée de 2 cabines (en bois), les portes (en bois) étaient grandes ouvertes et l'on pouvait apercevoir au dessus des trous (en bois) à même les planches (en bois) des nuées entières de grosses mouches vertes tournant frénétiquement au-dessus des orifices comme les automobilistes sur la place de l'étoile. Elle et moi restâmes à quelques mètres en retrait, contemplant l'inimaginable spectacle. Puis nous nous regardâmes, stupéfaits et incrédules, puis elle dit "bon, pas le choix, j'y vais." "Bon, ben pas le choix, j'y vais aussi". Je respirai un grand coup, retins mon souffle et filai dans l'infernale chambre à gaz. Je fermai la porte, me déculottai, pris la pose du fondiste (skieur de fond) en descente, puis je dû respirer, à peine, juste un peu, de quoi ne pas m'étouffer. Soudain une odeur indescriptible envahit mon reniflard, mais d'une telle abominable puanteur que je crus vomir et vanouir tout à la fois. Je toussai, dégorgeai, et avec la force du désespoir j'ouvris la porte hystériquement afin de faire rentrer un peu d'air (et tant pis pour les spectateurs éventuels). Lorsque je repris enfin mon souffle, je remarquai par les planches désassemblées, que ma compagne d'infortune, à ma gauche, se trouvait dans la même situation: même position, même asphyxie, mêmes borborygmes. Elle finit également par ouvrir la porte quelques secondes après moi (sans doute plus de souffle), et après avoir repris sa respiration, jeta un oeil dans ma direction.
Nos regards se croisèrent par les interstices, nous sourîmes impudiquement l'un à l'autre, puis regardâmes de nouveau droit en face de nous, afin de ne pas louper un virage dans la descente. La chose fut livrée en moins d'une minute, et je quittai le lieu prestement laissant la malheureuse dans son embarras. Ben quoi? J'allais quand même pas l'aider non plus?

Avant de repartir, nous eûmes encore l'occasion de sortir de l'eau le canoë retourné d'une paire d'andouilles qui avait essayé de franchir à son bord la chute d'eau d'un mètre et demi. En pleine vitesse, l'embarcation s'était soudainement heurtée contre des cailloux projetant les 2 occupants par-dessus bord vers l'avant. Et tandis que le premier essayait de retenir le canoë dans le courrant, le second flottait sur le dos à la surface de l'eau, conscient, mais le genou saignant comme une grappe d'hémorroïdes éclatée. C'est bête un pubère quand même, parce que c'était marqué de partout: "danger de mort", "fort courrant", "risque de noyade", "sortez de vos embarcations"... Une fois assistance promulguée, nous enfourchâmes nos bananes jaunes et voguèrent vers de nouvelles aventures.

En arrivant au village de "Vojkovice", nous fîmes halte pour nous restaurer dans le remarquable restaurant "Vojkovice". Malgré que le patron ait singulièrement manqué d'imagination pour l'intitulé de son enseigne, l'établissement en soi était plus qu'honorable: bières fraîches et de qualité ("Prazdroj" et "Gambrinus") à des prix incomparables (respectivement 23 et 17 Czk, 0,80 et 0,60 € le demi-litre), et les fayots mexicains à 52 CzK (1,82 €) les 300gr n'avaient pas de défauts, sinon qu'il aurait pu y en avoir plus (à 8 nous avions épuisé ce qu'il en restait de).
Rajoutez à cela un service affable et souriant, et vous comprendrez que cette auberge est une bonne adresse pour ceux qui passent dans le coin.

Puis quelques kilomètres plus loin, nous atteignîmes le point ultime de notre voyage, l'auberge dans le moulin ("Hospoda Ve mlýně") dans le patelin de "Mlýn na Ohři" près de "Jakubov". Nous avions rendez-vous avec le loueur de canoë qui allait récupérer son matos. Ensuite nous allions passer la nuit (sous la tente) sur place puis rentrer dans nos pénates le lendemain. Et pendant que nous montions nos tentes, nous rencontrâmes un bon pote à nous, "Robajz" de "Plzeň", qui faisait également le circuit. Pour vous dire comme c'est couru la descente de rivière en canoë, parce que la probabilité de tomber dessus, sur ce bougre, était quand même sacrément limitée.

Nous discutâmes quelques minutes, puis il repartit sur l'eau tandis que l'orage arrivait. Soudain il se mit à tomber des cordes, énormes, comme il sait en tomber à chaque fois que l'on souhaite profiter de l'extérieur, genre BBQ, pétanque, chasse aux papillons... Enfin pas grave, car nous sommes allés dans l'auberge du moulin, qui du reste est extrêmement sympathique, la bière est excellente et la soupe à l'ail itou. Je recommande vraiment, sauf pour la douche. Ah pour sûr que lorsque j'appris qu'il y avait une douche, disponible pour 30 CzK (1 € à la louche, la douche) je voulus en profiter. Alors fallait attendre un peu, pas trop, mais bon, hein, pour une douche, chaude de surcroît. Lorsque je suis arrivé dans la cabine, j'ai commencé par lire les instructions. Le jeton dans la fente, la cellule photo électrique qui, d'un mouvement de la main, mettait en marche ou arrêtait l'eau, les diodes indiquant l'eau restante, bref tout était OK.
Pis me retournant dos à la douche, je remarquai un bordel immonde sur le sol, cheveux, poils, graviers, chewing-gum... "Ah ben ça mon bon Seigneur, t'es sans doute pas le premier à l'utiliser aujourd'hui, le rince vermine" que je me dis-je. "Allez hop, à la douche comme à la guerre, au pire je soignerai mes eczémas et mes verrues à mon retour" et j'agitai ma mimine devant la cellule photo électrique. Sans trop y croire, l'eau se mit effectivement à couler, abondamment et chaude. "Hum... c'est curieux, il doit bien y avoir un loup dans c'te histoire, ça me parait trop beau pour être possible." Et le loup finit par sortir du bois au bout de 30 secondes. Avec toute la merdasse immonde qui jonchait le sol, l'eau ne s'écoulait pas et formait une soupe abjecte où les gales psoriasiques se mélangeaient aux pilosités d'origines diverses. Enfin ne s'écoulait pas... si l'eau s'écoulait, mais il fallait 5 minutes pour écouler 30 secondes de douche. Et comme je ne voulais pas mettre mes pieds dans ce bouillon répulsif de dermatoses hétéroclites, je dus me doucher à l'eau, au savon et à la patience. Enfin j'en suis sorti indemne, heureux d'un lavage après 48h sans nettoyage, malgré les conditions inhospitalières auxquelles je commençais à m'acclimater. En toute fin de soirée la pluie cessa, l'on chanta quelques chansons accompagnées à la guitare tantôt par ma chérie d'amour, tantôt par un autre compère, puis au lit tout le monde après avoir soiffardé tout ce qu'il nous restait d'alcool afin de ne pas avoir à le ramener.

Alors après une soirée pareille, j'avais le matin l'estomac un peu... barbouillé. Puis après avoir plié le matos, nous partîmes vers la gare de "Vojkovice". Surprenant, elle se trouvait dans un état de délabrement manifeste. Le bâtiment était ouvert, mais le guichet, comme les aisances étaient fermés. Pis ça tombait rudement mal, parce que justement je voulais m'y rendre, aux aisances.
Ouah la poisse alors, mais qu'est-ce que je vais devenir? Je ne vais quand même pas aller dans les bois en cette fin de calvaire en pleine nature? Je pensai alors qu'en faisant quelques photos de cette gare fantôme surréaliste je me changerais les idées. Finalement je fus sauvé par le train qui arriva quelques minutes plus tard, et mon barbouillis éthylique finit sur le ballast entre "Vojkovice" et "Karlovy Vary". Merci "ČD" (la SNCF tchèque), z'avez fait fort quand même tas de pignoufs. Une gare sans toilettes et sans guichet, c'est utile comme des freins sur un corbillard, sans dec, chuis scié. Enfin l'on finit par rentrer à Prague, retour à la civilisation, et je ne veux plus entendre parler de nature, camping, chiottes en bois et absence de douche avant l'année prochaine. Ceci dit c'était une expérience extra, j'ai adoré, et je pense sincèrement que j'y retournerai dans un an, mais sûrement pas avant, et définitivement pas pour plus de 4 jours.

Et pour conclure donc, je conseille vivement à tous ceux qui n'ont pas vécu cette expérience de la vivre au moins une fois, mais nécessairement à plus de 10 personnes et nécessairement avec une grande majorité de "Vodák" tchèques. Sinon je rassure ma maman et mes lecteurs, à aujourd'hui, un mois et quelques semaines après cette aventure, je n'ai pas constaté plus de pustules ni de dermatoses que d'habitude sur mon corps. Il semblerait donc que les crèmes, pommades, insecticides, pesticides et fongicides dont je me suis copieusement oint en chaque occasion aient fait merveille. Aussi les téméraires qui décideraient de vivre cette aventure peuvent me contacter afin que je leur fournisse la liste intégrale avec les noms en latin de ces vitaux produits formidablement efficaces contre les multiples dangers de la campagne sauvage.

Commentaires

Anonyme a dit…
Youpi !!!
c'est marrant que tu parles de ça... je reviens juste d'un week-end d'intégration (pas le vrai, bizhutage à fond, celui-là il sera en novembre) et on a fait du canoë dans l'Aveyron, département placé en alerte orange pour cause de précipitation (froides et mouillées). même comme ça c'est bien le canoë mais tu es certain de choper une méga crève ! (j'en suis la preuve plus tout à fait vivante)
Et vive les charentaises !!!!!!!!!!
A ciao
Strogoff a dit…
Euh... ben pas moi, pas moi la crève, je ne l'ai pas chopée. D'abord parce qu'il ne faisait pas trop froid, pis ensuite avec les odeurs épouvantables partout et tout le temps, j'imagine que les microbes sont allés faire du canoë dans l'Aveyron plutôt que vers chez nous :-) Pas de bol, hein?

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