Ailleurs: La forteresse de Karlštejn
Quoi? Diantre de fichtre di diou! Encore? Encore un château? Ben vouais, car celui-là je l'avais dans mes cartons à photos depuis une paire d'années, et donc enfin, je vous publie une publie sur "Karlštejn" qui, après le château de Prague, est le plus visité de toute la République. Et commençons de suite par une parenthèse qui mérite assurément le détour, car chers lecteurs, si vous visiteguidez ce beau château, c'est une des premières choses qui vous pétera à la figure comme un poing hostile dans la trogne. On pourrait intituler cela "un accueil chaleureux", ou "bienvenus au castel". En montant les abrupts escaliers qui vous mèneront vers le lieu de rassemblement de la visite, à savoir la première salle dite "Dvořenínská síň" (ou vestibule d'attente pour le commun du bon vouloir royal de faire présence), vous ne pourrez pas ignorer l'inscription mentionnant qu'il est "interdit de traduire". Eh oui chers lecteurs, vous avez bien lu. Je connaissais l'interdiction de photographier, de fumer, de porter une arme, de téléphoner, d'être nippé en short et marcel, de porter un chapeau (inversement de ne pas en porter), d'emmener un chien en laisse, de faire du patin, de lécher une glace, et de cracher (respectivement uriner) par terre, mais c'est la première fois que je voyais un écriteau spécifiant qu'il était "interdit de traduire". D'ailleurs j'en ai pris une photo tellement c'est prodigieusement inconcevable. Sans dec, après avoir bringuebaladé ma viande sur 4 continents et avoir visité plus de 30 pays, après avoir épluché des centaines d'ouvrages éminemment intelligents traitant de tout et de n'importe quoi dans le but de m'alphabétiser un peu, après avoir ouvert (un peu aussi) mon esprit à la culture, à l'histoire, à la science et au monde afin d'acquérir une certaine philosophie de la vie pour le moins philanthropique et empreinte d'un altruisme bienveillant, et après avoir glané et stocké dans mon petit encéphale suffisamment de vocabulaire dans diverses langues afin de partagéchanger avec mon prochain, je me vois assener à la vue une "interdiction de traduire". Sérieusement, je ne regrette pas d'avoir vécu raisonnablement longtemps pour voir ça. Emballez la pancarte dans du formol, un jour faudra la montrer aux Martiens. Bon, trêve de rigolade, parce qu'en dehors du fait que l'inepte imbécile responsable de cette couillonnerie enfreint allégrement la liberté d'expression, le droit à l'information, sans parler des lois fondamentales de la constitution de notre République, de la déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen (et même du con qu'il est), donc sans parler de tous ces principes élémentaires sur la base desquelles je pourrais trainer l'abruti devant les tribunaux du monde entier afin d'en presser jusqu'au dernier jus de radis et vivre en milliardaire pendant 50 générations, si j'étais avocaméricain (ce que je ne suis malheureusement pas), alors sans parler de tout ça, ce fruste primitif occasionne avant tout une bien triste publicité au tourisme tchèque et à l'hospitalité du pays aux yeux des quelques 300.000 touristes qui visitent "Karlštejn" chaque année. Ensuite et dans la pratique, j'aimerais savoir comment cette interdiction est appliquée? Imaginez, moi par exemple qui parle couramment le Swahili (avec cependant un léger accent Finlandais), je vais m'adresser à mon compagnon de visite dans cette langue. Comment diable le responsable du respect de l'interdiction de traduire va-t-il savoir que je traduis, ou que je lui (à mon compagnon) demande s'il sait où se trouvent les toilettes? Bon, oublions l'autre fé con et passons à plus fécond.
Et comment c'est venu?
Il était un jour, le bon roi Charles IV... Quoi? Diantre de fichtre di diou! Encore? Encore le bon roi Charles IV? Ben vouais, que voulez-vous, on lui doit tout à Prague, sans lui on n'aurait sans doute même pas le métro à l'heure qu'il est, et j'y peux rien s'il est à l'origine de 90% de Prague, pas ma faute à moi... Donc il était un jour lui, et donc un jour, et il se dit comme ça à lui-même dans sa tête: "Dis-donc Charles, maintenant que nous avons la plus fantastique couronne royale du monde connu, que nous avons une collection de saintes reliques séchées-salées pour bâfrer tout l'hiver, que notre empire s'étend sur l'Europe comme jamais aucun empire ne s'est sur l'Europe étendu, que nous sommes appréciés du peuple et craints de la chienlit, que cette vieille fripouille de papàrome nous a à la bonne (du curé), que toutes ces choses sont consignées dans une montagne de paperasse administrative qu'il va falloir que nous présentions aux autorités compétentes afin de faire valoir notre droit à la retraite le jour viendu, donc ben maintenant que nous avons tout ça, et c'est velu-copieux, ben ça va nous faire de l'envieux à la tonne. Aussi serions-nous bien avisés de mettre tous ces trésors bien à l'abri, accessoirement nous y compris." Et paf, tiens, l'idée de construire un "Karlštejn" fortifié comme un fort Knox finit par éclore dans la tête du bon roi en tout début des années 1340. Mais entre les recherches de l'emplacement idéal, de l'architecte, des entreprises de construction et du maître d'oeuvre, les complications liées aux permis de construire, au cadastre et au POS, les dilemmes relatifs au confort, à l'économie d'énergie, à l'écologie environnementale et aux matériaux recyclables, sans parler du papier peint, du carrelage, des sanitaires/robinetterie et de la couleur des rideaux sur lesquels Blanche de Valois n'était pas prête au moindre compromis, ben entre l'idée et la mise en oeuvre, il se passa un bout de temps. C'est ainsi que le chantier ne débuta qu'au printemps 1348 selon les plans d'un architecte dont on ignore totalement le nom, mais qu'on renifle fortement être l'architecte royal d'alors, d'Arras, Matthieu d'Arras (d'alors), sans la moindre preuve formelle cependant. On renifle également que "Petr Parléř" aurait apporté sa touche après la mort du Matthieu (en 1352), mais de nouveau sans aucune preuve certaine. D'ailleurs quand on considère le travail de titans que ces gaillards avaient sous le coude à Prague (le château, la cathédrale, le pont, la nouvelle ville...), on est logiquement en droit de supposer que la demeure de campagne de Monseigneur eût pu avoir été déléguée à un teneur d'échelle sous-fifresque. Anecdote: alors que la pauvre Blanche aura fortement empreint de son effluve français (eh ouais, et pas française, car effluve est un substantif masculin) la décoration sur les plans initiaux (insistance particulière sur la pause de bidets dans toutes les salles de bain par exemple), elle décédera seulement quelques semaines après l'ouverture du chantier, en août 1348, sans même avoir eu la chance de voir un pan de mur.
Le nom "Karlštejn" vient de l'Allemand, de "Karl" (Charles) et de "stein" (pierre, caillou, rocher...), soit la pierre de Charles, ou mieux, le rocher de Charles. Ca en impose non? Et pourquoi un nom Allemand pour le château d'un roi de Bohême tchéco-luxembourgeois à l'éducation française parlant latin de surcroît? Ah oui, ben tiens, et pourquoi? Ben parce qu'à l'époque du bon roi Charles IV, 75% des méchants belliqueux provenaient de pays germanophones (aujourd'hui Allemagne, Autriche...), et que nommer une fortification qui impose le respect dans la langue maternelle du barbare, c'est vachement plus efficace que de donner un nom pour lui insignifiant. Tiens, exemple: si les Français avaient nommé la ligne Maginot die Maginot-Linie, alors on ne serait jamais entré dans l'effroyable bordel de la seconde guerre mondiale, car les Allemands se seraient respectueusement tenus à carreau derrière le Rhin. Alors que là, la ligne Maginot leur était tellement inconnue et négligeable qu'ils l'ont contournée par la Belgique pour arriver aux portes de Paris en juin 1940... enfin bref... vous connaissez la suite. Tout ça pour dire que c'était particulièrement bien meublé et de style dans la tête de notre bon roi Charles, et que ses décisions, même d'apparence incohérentes, avaient été prises après mûre réflexion des connaissances de ce qu'on se cause (pas comme l'autre interdiseur de traduire, l'andouille grasse).
Et comment ça a commencé?
Et donc le 10 juin 1348, le bon roi Charles IV posait la première pierre du castel "Karlštejn", d'abord en présence du premier archevêque de Prague "Arnošt z Pardubic", puis avec l'aide d'icelui après avoir prononcé les fameuses paroles: "dis-donc le moine, et quand t'auras fini de jouer avec le goupillon qui goutte et le sac à main qui fume, tu relèveras ton peignoir et viendra me filer un coup de main pour déplacer cette foutue *$#@+%&! de pierre..." Ceci dit, cet épisode est plutôt controversé par les historiens, car en mai et juin 1348, le bon roi Charles s'en visitait la Moravie dans le cadre d'une remise en ordre de son proche empire (version officielle, officieusement il faisait la tournée des caves vinicoles), aussi il est fort peu probable qu'il ait lui-même assisté (et encore moins probable qu'il ait lui-même participé) à la pause de cette foutue *$#@+%&! de pierre.
La construction commença par l'indispensable, et du bas vers le haut (topographiquement). Au plus bas du château donc: la tour du puits (qui n'en est pas un, c.f. plus loin) afin que l'on ait à boire. Ensuite l'on construisit la maison du burgrave et les dépendances, parce qu'un château sans concierge, sans hommes d'armes, sans larbins, ben c'est pas vivabitable. Vint ensuite le palais royal, la tour mariale (et sa chapelle dédiée à Ste Marie), la grande tour qui est un fort en soi à l'intérieur du château avec ses 25 x 17 m de surface, une épaisseur murale moyenne de 4 m, et jusqu'à 6 m côté nord, en prévention des Suédois. Et dedans la grande tour, se trouve la fameuse chapelle St Croix (c.f. plus loin). Les gros travaux furent terminés en 1355, puis l'on attaqua la décoration intérieure comme extérieure. Le 27 mars 1357 le bon roi Charles IV se rendit au château en compagnie de ses saltimbanques afin d'y fonder le chapitre (de "Karlštejn"), et c'est à partir de cette date que l'on considère la mise en service officielle du castel. Signalons cependant que les tours furent réellement achevées qu'en 1360, et la fabuleuse chapelle de la Ste Croix qu'en 1365, mais y avait du boulot dessus aussi, donc c'est pour ça.
Bien, mais passons un peu en revue la position géographique de notre édifice. Tout d'abord vous remarquerez (si vous y allez) que contrairement au commun des châteaux (mais à l'instar des champignons des bois), celui-ci est pratiquement invisible de loin, car rien ne trahit sa présence si vous ne vous trouvez pas à moins de 250m de ses murs. C'est grâce aux 4 petites collines qui entourent savamment l'édifice: "Kněží hora" (357m), "Haknova" (402m), "Plešivec" (362m), "Prostřední vrch" (383m). Bon, exception faite si vous allez jouer au golf de "Karlštejn", d'où j'ai pris les photos éloignées. Là, vous voyez le château d'environs 1,5 à 2km, mais n'oubliez pas qu'au XIV ème siècle, personne ne jouait au golf en Bohême (à cause du prix), et qu'à la place du gazon coupé à l'anglaise, se trouvaient des forêts drues velues bouchant la vue aux ennemues, eh viu (et empêchant aussi de jouer au golf). Ensuite l'accès vers l'intérieur du château fut conçu fort ingénieusement, obligeant l'éventuel belligérant à contourner l'édifice sur un étroit chemin abrupt d'ouest en nord, passant par le sud et l'est, tout autour de la grande tour du haut de laquelle les défenseurs se faisaient un malin plaisir de tirer, jeter, lancer, lâcher, décocher, catapulter, un tas d'objets, de matières et de liquides les plus divers sur les pauvres bougres d'en bas (y en a même qui crachaient, alors que c'est interdit).
Après?
Ben après la fin du règne de notre bon roi Charles IV, la grandeur de notre forteresse déclina. D'abord parce que son fils "Václav IV" n'en avait guère à fiche (il construisait ses propres châteaux), et ensuite parce que lors des guerres hussites, les burgraves (et donc le château) soutenaient la cause catholique, c'qui n'était pas une bonne idée. D'ailleurs malgré que le bon roi Charles eut fortifié l'édifice comme aucun autre (roi et 10 fils... édifice), devant l'incertitude des aléas du hasard, non seulement le souverain s'y rendit guère, mais même les joyaux de la couronne furent maintes fois déplacés (le plus souvent à Vienne), des fois que la forteressede Vienne... ne vienne à tomber. Et encore, tout dépend si on se parle des joyaux de la couronne de Bohême ou ceux du St Empire Romain Germanique. Sans entrer dans les détails de leurs voyages, ceux de la couronne de Bohême se trouvent aujourd'hui en la cathédrale St Guy, St Venceslas et St Adalbert, et plus au château (il y reste cependant une copie de la couronne). Et ceux de la couronne du St empire on s'en fout, parce qu'il n'existe plus, l'empire. En 1422, les praguois (hussites) assiégèrent plusieurs fois le château sans succès, et curieusement ce ne sont pas eux qui causèrent le plus de dégâts mais bien les défenseurs de la forteresse. Car à défaut d'être payés par cet imbécile d'empereur Sigismond, ils se payèrent eux-mêmes en pillant les trésors artistiques, fondant l'or et revendant au plus offrant. C'est sous Rudolf II, et la gouvernance du burgrave "Jáchym Novohradský z Kolovrat", que le château prit des allures renaissance (entre 1578 et 1597). En 1625, cette immonde fripouille de Ferdinand II transformera le statut du château (et du domaine) en propriété dotale des reines de Bohême, et le château fort gourmand en entretien, commencera doucettement à se délabrer. En 1648, les Suédois (fumiers) mirent le siège au château. Ils s'en emparèrent pratiquement en entier, sauf de la grande tour. Comme elle formait une forteresse à elle toute seule, elle résista plus longtemps que les autres parties, et après avoir pris possession de 80% de la forteresse, les pilleurs abandonnèrent leurs efforts, ignorant l'existence de la fantastique chapelle (fumiers, faignants et ignorants). Et fort heureusement qu'ils abandonnèrent, car il est fort à parier que ces vilains bougres auraient, comme d'habitude, tout emporté dans leur pays de sauvage. Ce n'est qu'en 1812, que l'empereur François 1er (l'Autrichien, pas le Français), en visite dans le coin, fut saisi par la beauté de l'édifice et ordonna sa restauration, intérieure comme extérieure. Mais ça mit du temps, et du vrai, genre les gars, on ne les sentait pas trop d'sus comme aurait dit ma chérie, parce que ce n'est qu'en 1866 qu'on mit réellement l'architecte "Friedrich Freiherr von Schmidt" (Friedrich Schmidt pour ses potes) sur le coup, avec pour objectif une vraie et totale bonne restauration de "Karlštejn". Ainsi 1887, l'on commença le massacre sous la direction du bien connu "Josef Mocker" à qui l'on attribuera (sans doute injustement) la totalité du désastre tel que vous le voyez aujourd'hui. Ah bon, vous ne trouvez pas? L'on modifia les remparts, certains en plus, d'autres en moins, l'on supprima les frontons renaissance, re-stylisation des toitures, les murs à colombage furent remplacés par du coffrage en bois... regothisation puriste que cela s'appelait. Mais ce n'était en fait même pas une regothisation, car en fait l'édifice reçut une apparence qu'il n'eut jamais vraiment, en fait. Enfin c'est fait, on n'y changera plus rien. Ah oui, et ce fut rouvert en 1910 au public.
Y a quoi d'dans?
Ben dedans, y a des pièces à voir, et dans les pièces, parfois même des trucs. Mais j'ai pas le droit de traduire, alors chais pas si je peux vous en parler en Français parce que mon guided tour était en Anglais. Allez, si, je vais en parler... Mais avant tout, juste une info sur le gaillard qui nous menait, car il était fort sympathique, souriant, affable, et pour une fois, ne récitait pas monotonement son texte. Bravo p'tit gars, c'était bien, vraiment. Donc nous sommes entrés dans la pièce du rassemblement d'andouilles dont nous étions, moi et mes 2 petites Américaines, eh oui, encore... Parenthèse: non maman, je t'assure qu'il n'y a rien entre elles et moi. C'est purement de l'amitié, de la sympathie, et nos relations sont exclusivement culturelles et urbaines. J'aime ma chérie d'amour à moi, et je ne suis pas une bête primitive instinctivement mue par une impulsion chimique provoquée par des milliers de phéromones savamment expulsées dans l'organe voméronasal de mon reniflard par les glandes apocrines situées sous les aisselles, autour des mamelons et dans les aines de ces 2 femelles. Je t'assure donc, rien que du culturel et du naturel-bio. Fin de parenthèse. Apparemment, cette pièce servait de rassemblement à l'escorte d'accompagnement du roi lorsqu'il partait en balade. A voir: la carte de l'empire du bon roi Charles IV lors de son règne, et une maquette du château de "Karlštejn" tel qu'il devait être au XIV ème siècle (selon les fouilles archéologiques). Ensuite nous passâmes dans la salle des chevaliers (ou des vassaux). La première chose que vous verrez, ce sont les armoires dans lesquelles les gaillards rangeaient leurs fourbis, armes et St frusquin. Les portent sont peintes des armoiries de chaque bougre, afin qu'ils ne pussent se planter, et enfiler les collants d'un autre. Ensuite vous y verrez des malles totalement quelconques, qui contenaient des archives totalement importantes. Et avant de quitter cette salle, vous mettrez encore un oeil dans la chapelle St Nicolas, dont je ne me souviens plus de ce que dedans il y a. Enfin si, quelques statuettes, un tableau, mais chais plus ce qu'ils représentent, ce qui est sans doute la preuve que ce n'est pas spécialement important. La salle des ancêtres, alors là c'est top, z'allez vous marrez grave. D'abord parce que les tableaux datent du XVII et XVIII ème siècle, donc aucunement de l'époque dont on se cause (fin XIV ème siècle pour ceux qui ne suivent pas), ensuite parce qu'ils représentent des ancêtres supposés de notre bon roi Charles (du côté de sa maman, "Eliška Přemyslovna") dont l'histoire n'est pas vraiment sûre (qu'ils aient historiquement existé, les ancêtres), alors pour leur dessiner une trombine, fallait vraiment une bonne dose de fantaisie. Tout commence donc avec l'ancêtre et guide "Čech" qui mène sont peuple en bohême, mais ce n'est pas un ancêtre génétique, donc il n'est pas peint. Puis la lignée débute avec sont successeur politique "Krok", ses filles "Kazi", "Teta", "Luboša" ("Libuše") son mari "Přemysl", et leur descendance "Nezamysl", "Mnata", "Vojen", "Vnislav", "Křesomysl", "Neklan", "Hostivít" jusqu'au "Bořivoj Ier", le premier dont on est formellement certain qu'il ait existé. Ca c'est selon la généalogie établie par le grand "Kosmas" (Cosmae pragensis) et complétée par "Dalimil" puis "Přibík Pulkava z Radenína". Ceci dit, et je le répète, il y a de forts doutes sur ces princes mythiques car le texte contenant ces noms est obscur, mal écrit, et pourrait être un fragment d'une phrase cachée plutôt qu'une liste de noms. Mais dans la salle, ils y sont, peints, les principaux. Chais plus vraiment lesquels d'ailleurs, "Krok" ou "Přemysl" me semble-t-il, puis "Bořivoj Ier". Enfin c'est pas grave, mais ce qui est sûr, c'est que contrairement aux tableaux de Habsbourg, on ne voit aucune séquelle de l'héritage consanguin sur leur faciès :-)
Dans le fond de la pièce des ancêtres, se trouve la salle à bâfrer. L'accès y est impossible, donc vous devrez faire la queue derrière les empotés pour mettre la tête dans l'encadrement de l'étroite porte qui sépare les 2 pièces. Puis vous arriverez à la salle d'audience. Celle là elle vaut vraiment le coup. D'abord pour les boiseries, aux murs comme au plafond. La plupart sont d'origine et avaient pour but de réchauffer la salle, enfin la protéger des murs froids (z'auraient mieux fait d'acheter des radiateurs). Ensuite vous y verrez des restes de fresques murales, d'époque aussi. Ensuite, hop vous passerez directement dans la chambre à coucher du bon roi Charles IV. De longues draperies recouvrent les murs, elles sont fausses (enfin pas d'époque), et leur fonction était, comme précédemment le bois, de réchauffer la pièce (toujours pas de radiateur). Vous n'y verrez pas le lit royal, y a plus, mais vous y verrez la petite chapelle, avec un retable diptyque de voyage (portatif, mobile) peint par "Tommaso da Modena" (peintre à la cour) car notre bon roi Charles était un cul bénit et papiste convaincu. Est-ce également pour cette raison qu'il fit aménager les escaliers qui montent dans la chambre de la reine (ou de la bonne) à droite de cette chapelle? Genre une prière, une pipe, et au lit? Ensuite vous passerez dans une petite pièce, qui servait fort probablement à la garde personnelle du roi sous le bon Charles, mais qui fut transformée par la suite en boudoir (ou bureau) pour le chapitre du castel. Remarquez l'imposant crucifix qui daterait des années 1420, les divers jeux de société sous vitre du XV ème siècle, ou encore les aisances primitives desquelles la matière tombait le long du mur au bas de l'édifice sous l'effet de la pesanteur.
Pis vous passerez à la tour Mariale, au premier étage car c'est le seul qui se visite. Bien que cette salle ait servi à tout et à rien, genre stockage de fourbi qu'on ne savait pas où mettre ailleurs, ce n'était pas la salle aux trésors qu'elle est aujourd'hui. Alors dans les trucs fantastiques, enfin moi j'ai trouvé, c'est la fabuleuse collection de chasubles du XV ème et XVI ème siècle. C'est dément, approchez-vous bien près, et regardez bien les détails, les broderies, les fils qui maintiennent les perles. Imaginez seulement un instant le travail, la sueur, et le talent que cela devait représenter derrière? Parce qu'aujourd'hui par exemple, vous dessinez vaguement une chasuble au bic noir sur le dos d'un ticket de métro, dans un bistrot, hop, Allah va vite... à la akbar... enfin rapidement. Puis vous photographiez le croquis à l'aide de votre téléphone portable, et bazardez en Chine via Internet Mobil un Email laconique en anglais approximatif, l'image en pièce jointe. Vous patientez 5 jours, et au matin du 6 ème sont livrés en express devant votre porte les premiers échantillons d'une combinaison de plongée antiatomique pour archidiacre nauticosportif parce que le petit niacoué assis devant l'ordinateur en Asie la tête en bas n'a pas tout compris à votre commande. Mais c'est pas grave, ce que je veux dire, c'est qu'aujourd'hui, en à peine plus de temps qu'il n'en faut moins pour le faire, et bien vous pondez un modèle complexe de n'importe quoi, vous mettez l'industrie chinoise en branle, vous fabriquez du kilo à la tonne, et vous distribuez worldwide le plus inutile de n'importe quel machin, comme une chasuble par exemple. Alors qu'avant... Ensuite il devrait y avoir aussi l'armure (enfin un bout de l'armure) de St Venceslas. Bien sûr, c'est sans garantie aucune, parce que mille ans en arrière, qui sait à qui elle a vraiment appartenu... Vous verrez également des bouts d'extraits de fresques qui se trouvaient auparavant dans les escaliers menant à la chapelle Ste Croix, des angelots flottant dans les airs et jouant de la musique pour accompagner le pèlerin. Et le truc le plus faramineux, c'est le crâne d'un grocodile tout bête, tout simple (du Nil semblerait-il, souvenir de croisade), et que le bon roi Charles IV avait acquis en son temps comme la relique du dragon cracheur de feu qui fut terrassé par St Georges en personne. Je me demande combien il a payé ça, le bon roi naïf? Vous terminerez la visite par la prison, qui est aujourd'hui transformée en Souvenirs-Shop accessible par un petit pont levis. L'intérêt principal ne sont bien évidemment pas les souvenirs, mais le plafond en traverses de bois de la fin du XV ème siècle, l'un des plus anciens (sinon le plus ancien) plafond de ce type encore conservé d'origine.
Ensuite il reste des trucs à voir, mais ceux-là vous pouvez les voir même sans payer, car c'est hors du circuit payant. Mais défense de traduire, n'oubliez pas. Donc commençons par la tour de l'horloge. Evidemment, vous y trouverez, à l'étage du haut, encore des souvenirs, super, mais si vous descendez les escaliers en bois, juste à gauche de l'entrée, alors vous arriverez dans la pièce de la cloche de Ste Catherine. Bon, sympa, ok, et il semblerait qu'elle soit encore utilisée dans les grandes occasions. Ah bon? Ensuite il y a la tour du puits, et celle-là mérite le coup d'oeil au moins pour le mécanisme unique qui permettait de remonter l'eau. En fait c'est une grande roue en bois d'un diamètre de quelques 3 m, et ça fonctionne sur le principe des roues pour les cureuils ou les cochons-dindes, que vous avez dedans la cage. Autour de l'axe s'enroule une corde, avec en son bout un sceau d'une contenance de 70 litres, permettant d'atteindre la profondeur de quelques 80 m. Il fallait environ 10 minutes pour descendre le sceau, remuer la corde pour remplir le récipient, puis remonter le lourd fourbi vers le haut. Par contre ils ne disent pas combien de cochons-dindes ils avaient besoin pour faire fonctionner l'attirail. L'autre truc, c'est que le puits n'est pas un puits. En fait il s'agit d'un réservoir creusé dans la roche, et alimenté par un petit ruisseau coulant à l'ouest du château. L'on avait artificiellement creusé une petite galerie souterraine (de 40 m) pour détourner une partie du ruissellement, et en l'époque, c'était un secret extrêmement bien gardé car d'importance stratégique en cas d'assiégement de la forteresse.
Anecdotes et historiettes?
Ah ben ça, y en a tout plein qui s'y rapportent au château des historiettes, mais faut faire gaffe, parce que toutes ne sont pas intéressantes. Il y en a même des qui sont carrément chiantes. Bon, moi y en a une qui me fait bien marrer parce qu'elle est liée... enfin z'allez voir. Tiens, lorsque le château fut officiellement intronisé, et lorsqu'on créa le chapitre de "Karlštejn", il fut clairement mentionné que la chapelle de la Ste Croix, originellement appelée de la passion du Christ et de ses instruments... dis-donc (parenthèse) c'est vachement gore quand même le catholicisme, cette espèce de complaisance et de perpétuation de la souffrance, du supplice... chais pas, ça me semble quelque part malsain, pervers, presque obscène (sado-maso)... bref... donc il fut clairement mentionné que la chapelle serait strictement interdite aux femmes. Ah bon?! Remarquez, on leur interdisait bien les brasseries et la mayonnaise parce qu'elles faisaient tourner les produits, alors pourquoi pas les chapelles, après tout, même un moine peut tourner (au moins la tête, pour peu que la dame soit bien nichue :-) Et donc selon la légende populaire, tout le château était interdit aux femmes (mais c'était pas vrai, juste la chapelle, et la brasserie, et la mayo... et la traduction). De là est donc née par exemple une pièce bouffonne spécialement écrite pour le nouveau Théâtre National par le grand "Jaroslav Vrchlický", intitulée "Noc na Karlštejně" (une nuit à "Karlštejn" en 1884), et dont l'intrigue principale est la présence de femmes (dont celle du bon roi Charles IV) dans l'enceinte du castel. J'en profite également pour vous mettre sous les zyeux un fantastique poème scatophile écrit par le même "Jaroslav", "Balada o hovně" (balade à propos d'un étron) où l'auteur présente ses réflexions sur un presse papier en forme d'étron, cadeau reçu d'un ami qui avait assurément du goût. Malheureusement c'est en Tchèque, et je ne sais même pas s'il existe une traduction française. Dommage, c'est beau. Tiens, pour vous donner une idée, vague, parce que je ne suis pas pouêt, mais ça pourrait sonner comme quelque chose dans le genre de:
Intro...
Sur ma table et depuis peu, repose un objet marrant,
c'est la réplique fidèle, d'un étron humain luisant.
Détendu en soirée, souvent sur l'étron je me recueille,
je me marre et verse une larme, lorsque je le porte à l'oeil.
[...] Là, je ne vous le fais pas, parce que c'est long, plaisant mais long, et comme chuis pas pouêt, et qu'en pouêsie chuis un amateur...
Conclu...
Ainsi qui vit ici-bas, l'étron devrait respecter,
car à quoi bon les millions, si l'homme ne peut pas chier?
Mais une chose me ravit, en l'étron je trouve vertu,
dans la merde nous sommes égaux, sans aucun malentendu.
Qu'il fut chié par le vulgaire, ou par un vaillant général,
l'étron conserve sa forme, et embaume le miasme fécal.
Quant au quidam, qu'il soit grand Sieur, ou mendigot quémandant,
qu'est-il de plus pour cet étron, qu'un rustique sac-à-merde vivant?
Alors j'entends déjà certains lecteurs m'envoyer des messages de réprobation, que c'est scato (oui), que c'est grossier (peut-être), que c'est indécent (selon le point de vue). Bon, ben et alors? Que voulez-vous, d'abord c'est pas de mon cru, ce n'est qu'une très imparfaite interprétation du texte originel (et nal... original) du grand "Jaroslav Vrchlický", et donc plutôt que de vous en prendre à moi si vous y voyez la moindre offense, je vous invite à vous retourner contre le talentueux auteur en personne, "Jaroslav Vrchlický", cimetière de "Slavín Na Vyšehradě, Štulcova, 120 00 Praha-Vyšehrad, Czech Republic". Et afin de n'oublier personne, j'aimerais également remercier "Dana" d'Helvétie (oh si...) qui eut la gentillesse et la sagacité de porter ce texte à ma connaissance. Bien, donc retour à la légende et à la pièce de théâtre.
En fait, dans la pièce de théâtre (et la légende), l'épouse du bon roi Charles n'était autre que sa dernière et quatrième femme, "Alžběta (i.e. Eliška) Pomořanská" (Elisabeth de Poméranie). Et un jour donc, après avoir lu Simone de Beauvoir, la reine excédée par les interdictions faites aux femmes (de traduire aussi?) décida de ne plus se raser, ni de se laver, ni de faire le sexe avec son Charles tant que les interdictions ne seraient pas levées. Et elle finit par avoir gain de cause après 2 ans, 9 mois, et 17 jours (sauf pour le droit de traduire, celui-ci perdure encore aujourd'hui). Faut dire que la bougresse avait, en plus du crin et du fumet, de la poigne, au point que le chroniqueur de l'époque, "Beneš Krabice z Weitmile" (parfois "z Veitmíle" ou encore "Benessii Krabice de Weitmile") écrivit dans ses Chronica ecclesiae Pragensis, qu'elle était capable de tordre de ses robustes paluches le fer à cheval d'un obèse percheron. Ca fout les boules! A se demander si elle n'en avait pas (des boules). Dis-donc Charles, t'avais pas peur dans le lit conjugal?
Une autre historiette (bête) raconte que les diables n'apprécièrent pas les desseins karlštejniens du bon roi, qu'ils lui firent les 400 coups pour l'escagasser, qu'ils s'enracinèrent dans la forêt afin d'harceler le voyageur, mais qu'un subtil berger en débarrassa le pays en les aguichant avec des pois salés (?! c'est con un diable) dont il se gavèrent goulûment, à la suite de quoi ils eurent soif, burent comme des sans (soif), puis explosèrent lorsque les pois commencèrent à germer dans leur grosse bedaine toute gonflée, et que le roi fit du berger un riche et noble chevalier de "Karlštejn". Mais sérieusement, cette histoire je ne vais pas vous la raconter parce qu'elle est d'une sottise, même pas drôle, d'un fanatisme idéologique qu'il est impossible qu'elle n'ait pas été inventée par la race des curés.
Il en est une autre d'historiette dans la même veine, qui parle d'un pauvre ménestrel aveugle et de son fidèle gros kiki poilu (canidé) qui se trouvaient toujours à l'entrée du château, sauf lorsque le roi "Václav IV" (le fils du bon roi Charles IV) les faisait mander en son palais afin de raconter (le ménestrel, pas le kiki) aux convives du banquet les histoires drôles qui faisaient bidonner l'assistance, mais qu'un jour un méchant voulu empoisonner l'invité du roi, le Sieur Bernhard, à l'aide d'une coupe de vin empoisonné, et que le kiki renversa la coupe, lapa le vin au sol, et trépassa dans la minute, sauvant la vie du Sieur qui découvrit le malfrat, le fit décapiter, puis que le pauvre aveugle inconsolable partit à l'aventure avec le Sieur Bernhard en sa contrée, mais qu'il n'alla pas bien loin (forcément, sans son fidèle gros kiki poilu), et qu'il décéda à "Litoměřice" où le Sieur le fit inhumer en l'église St Michel, et qu'il fit construire une colonne à l'effigie des 2 inséparables compagnons. Mais sérieusement, cette histoire je ne vais pas vous la raconter non plus, parce qu'il n'existe plus aucune trace ni de la colonne de l'aveugle détruite par un tremblement de terre en 1511, ni de l'église St Michel détruite au début du XIX ème siècle. Enfin cette fois c'est pas la faute des curés.
Et la chapelle de la Ste Quoi?
Alors la chapelle de la Ste Croix, ne se visite que sur réservation, et rien que. Donc si vraiment vous y tenez, et je vous le conseille vivement (bien que je n'y sois pas allé récemment), téléphonez à la Vence. Ce fantastique joyau serti d'or, de pierres (semi) précieuses et de tableaux gothiques est d'une richesse phénoménale, mais sa fragilité justement limite le nombre de visiteurs afin d'y maintenir le climat adéquat. Je vous ai trouvé quelques photos sur le Net afin que vous vous fassiez une idée. Quelques mots sur maître Théodoric ("mistr Theodorik, Mgr Theod, Magister Theodoricus, Theodoricus pictor, Theodoricus de Praga ", mais aussi "Dittrich, Dětřich, Jetřich". C'est le plus ancien peintre gothique en Bohême dont on connait le nom. Il rentre au service du bon roi Charles IV en l'an 1359, et laisse derrière lui la plus fantastique collection au monde de portraits gothiques de son époque. Les peintures de la chapelle de la Ste Croix représentent des personnages ayant vécu ou non, des saints, des martyrs, de papes, des évêques, des soldats de la légion de Thèbes... c'est énorme de beauté. Je vous ai trouvé quelques oeuvres du maître, son autoportrait, et des exemples de restauration de son oeuvre splendide. L'originalité de maître Théodoric par rapport à ses contemporains réside principalement dans les visages. Loin du schématisme alors en vogue, les traits des visages théodoriciens sont expressifs, profonds, presque vivants... au point que la légende raconte que le bon roi Charles IV en personne entrait nu-pieds dans la chapelle, par respect aux personnages qui le dévisageaient.
Et pour terminer sur cette splendide chapelle dont je recommande vivement la visite, principalement pour les peintures de maître Théodoric (que j'ai vues il y a quelques années de ça dans la galerie nationale du couvent Ste Agnès), donc pour terminer, signalons que la chapelle fut entièrement restaurée pendant 19 ans, et à nouveau ouverte en l'an 2000 avec la bénédiction de notre cardinal praguois "Miloslav Vlk".
Pis voilà, quoi
Signalons encore que le patelin "Karlštejn" dans lequel vous arriverez, garerez chèrement votre voiture (70 CzK, indépendamment de la durée), éventuellement vous restaurerez et achèterez l'un (ou plusieurs) des milliers de souvenirs moches, inutiles, stupides, voire sexuels (si si, il y a un sex-shop au début de la rue passante montant au château) dont vivent les quelques 750 résidents permanents, donc ce patelin est administrativement né en 1952 par la réunion des sous-patelins "Budňany" et "Poučník". Je vous ai trouvé une vieille carte militaire de l'empire Austro-hongrois (entre 1842 et 1852) où ils sont mentionnés respectivement sous "Budnian" et "Paučnik". Mais ce qui est intéressant, c'est l'étymologie des noms des localités qui datent de l'époque de la construction du château (1348). En cette époque, sont venus sur place des centaines (milliers?) de travailleurs, artisans, qui vivaient sur place. Et avant de se construire des maisons en dur, en bonne pierre, ils vivaient dans des cabanes (au Cabana). Et "cabanes" en Tchèque se dit aujourd'hui "Boudy" (mais en morave par exemple toujours "bůdy"), et de là sont nés "Budňany", les habitants des cabanes. Et "Poučník" alors? "Poučení" signifie "enseignement", "instruction", tandis que "poučený" est celui qui fut enseigné, instruit. On peut en conclure que "poučeník" (devenu "Poučník") était l'instructeur, l'enseignant, soit le maître artisan. Et si vous regardez sur la carte, vous y verrez également mention d'un patelin "Klucitz" au sud-est de "Paučnik" (aujourd'hui disparu). Certes, "klučit" signifie "défricher", mais si vous le mettez en relation avec le maître artisan ("poučeník") alors "Klucitz" pourrait venir de "klučík" (petit gamin, bonhomme) voire "kluci" (mômes, gosses) soit "l'apprenti". Puis au sud-ouest, assez loin de "Paučnik" et de "Klucitz" se trouve "Krupna". Et "Krup" signifie en Tchèque la même chose qu'en Français: "croup: localisation laryngée de la diphtérie, maladie infectieuse contagieuse, pouvant entraîner la mort par asphyxie." Donc "Krupna" devait être le village des contagieux: diphtérieux, lépreux, choléreux, bref... des souffreteux indésireux. C'est dingue comme on peut reconstruire les choses avec des fragments de machins.
Pour les picrateux, signalons aussi que dans les trucs à souvenirs (au château, comme le long de la route qui y mène) vous pourrez trouver de la vinasse des coteaux de "Karlštejn". Ce cépage a été rapporté de Bourgogne par le bon roi Charles IV, et vous en trouverez l'histoire commentée dans le récit de "Jan Neruda" (en bas de page). Et malgré que de prime abord, notre bon roi trouva le cépage verjuté, il en ordonna néanmoins son élevage intensif en 1358 sur les collines de "Vinohrady" (à Prague), derrière les fortifications de la ville, octroyant détaxe et privilèges aux vignerons afin d'en favoriser la culture (comme quoi l'Union n'a rien inventée en matière demagouille... subvention agricole).
Toujours le long du presque 1,5 km qui mène à pieds au château, se trouvent des kilomètres de restaurants. D'expérience je peux vous dire que j'y ai toujours bien mangé (dans 4 d'entres-eux), et pour des prix très raisonnables (moins de 150 CzK, 5,30 €). Rien à voir donc avec les pièges de la place Venceslas ou de la rue "Nerudova" (qui monte au château de Prague à partir de "Malostranské náměstí"). Ceci dit, jetez un oeil sur la carte avant de vous asseoir, on ne sait jamais avec ces bougres de cochons vivant du tourisme.
Et pour vraiment terminer, à seulement 12 km du château fort se trouvent les "Koněpruské jeskyně", qui sont des grottes naturelles avec toutes les stalagmites et stalactites qui vont bien. Moi je n'y suis pas encore allé, mais ma chérie si, et elle recommande vivement la visite, donc si jamais vous sortez trop vite du château, et qu'il vous reste 2h avant de rentrer sur Prague, ben voilà, genre une idée pour éreinter définitivement les chiards et la belle-mère, puis filer sereinement au bistrot avec les potes.
Et comment c'est venu?
Il était un jour, le bon roi Charles IV... Quoi? Diantre de fichtre di diou! Encore? Encore le bon roi Charles IV? Ben vouais, que voulez-vous, on lui doit tout à Prague, sans lui on n'aurait sans doute même pas le métro à l'heure qu'il est, et j'y peux rien s'il est à l'origine de 90% de Prague, pas ma faute à moi... Donc il était un jour lui, et donc un jour, et il se dit comme ça à lui-même dans sa tête: "Dis-donc Charles, maintenant que nous avons la plus fantastique couronne royale du monde connu, que nous avons une collection de saintes reliques séchées-salées pour bâfrer tout l'hiver, que notre empire s'étend sur l'Europe comme jamais aucun empire ne s'est sur l'Europe étendu, que nous sommes appréciés du peuple et craints de la chienlit, que cette vieille fripouille de papàrome nous a à la bonne (du curé), que toutes ces choses sont consignées dans une montagne de paperasse administrative qu'il va falloir que nous présentions aux autorités compétentes afin de faire valoir notre droit à la retraite le jour viendu, donc ben maintenant que nous avons tout ça, et c'est velu-copieux, ben ça va nous faire de l'envieux à la tonne. Aussi serions-nous bien avisés de mettre tous ces trésors bien à l'abri, accessoirement nous y compris." Et paf, tiens, l'idée de construire un "Karlštejn" fortifié comme un fort Knox finit par éclore dans la tête du bon roi en tout début des années 1340. Mais entre les recherches de l'emplacement idéal, de l'architecte, des entreprises de construction et du maître d'oeuvre, les complications liées aux permis de construire, au cadastre et au POS, les dilemmes relatifs au confort, à l'économie d'énergie, à l'écologie environnementale et aux matériaux recyclables, sans parler du papier peint, du carrelage, des sanitaires/robinetterie et de la couleur des rideaux sur lesquels Blanche de Valois n'était pas prête au moindre compromis, ben entre l'idée et la mise en oeuvre, il se passa un bout de temps. C'est ainsi que le chantier ne débuta qu'au printemps 1348 selon les plans d'un architecte dont on ignore totalement le nom, mais qu'on renifle fortement être l'architecte royal d'alors, d'Arras, Matthieu d'Arras (d'alors), sans la moindre preuve formelle cependant. On renifle également que "Petr Parléř" aurait apporté sa touche après la mort du Matthieu (en 1352), mais de nouveau sans aucune preuve certaine. D'ailleurs quand on considère le travail de titans que ces gaillards avaient sous le coude à Prague (le château, la cathédrale, le pont, la nouvelle ville...), on est logiquement en droit de supposer que la demeure de campagne de Monseigneur eût pu avoir été déléguée à un teneur d'échelle sous-fifresque. Anecdote: alors que la pauvre Blanche aura fortement empreint de son effluve français (eh ouais, et pas française, car effluve est un substantif masculin) la décoration sur les plans initiaux (insistance particulière sur la pause de bidets dans toutes les salles de bain par exemple), elle décédera seulement quelques semaines après l'ouverture du chantier, en août 1348, sans même avoir eu la chance de voir un pan de mur.
Le nom "Karlštejn" vient de l'Allemand, de "Karl" (Charles) et de "stein" (pierre, caillou, rocher...), soit la pierre de Charles, ou mieux, le rocher de Charles. Ca en impose non? Et pourquoi un nom Allemand pour le château d'un roi de Bohême tchéco-luxembourgeois à l'éducation française parlant latin de surcroît? Ah oui, ben tiens, et pourquoi? Ben parce qu'à l'époque du bon roi Charles IV, 75% des méchants belliqueux provenaient de pays germanophones (aujourd'hui Allemagne, Autriche...), et que nommer une fortification qui impose le respect dans la langue maternelle du barbare, c'est vachement plus efficace que de donner un nom pour lui insignifiant. Tiens, exemple: si les Français avaient nommé la ligne Maginot die Maginot-Linie, alors on ne serait jamais entré dans l'effroyable bordel de la seconde guerre mondiale, car les Allemands se seraient respectueusement tenus à carreau derrière le Rhin. Alors que là, la ligne Maginot leur était tellement inconnue et négligeable qu'ils l'ont contournée par la Belgique pour arriver aux portes de Paris en juin 1940... enfin bref... vous connaissez la suite. Tout ça pour dire que c'était particulièrement bien meublé et de style dans la tête de notre bon roi Charles, et que ses décisions, même d'apparence incohérentes, avaient été prises après mûre réflexion des connaissances de ce qu'on se cause (pas comme l'autre interdiseur de traduire, l'andouille grasse).
Et comment ça a commencé?
Et donc le 10 juin 1348, le bon roi Charles IV posait la première pierre du castel "Karlštejn", d'abord en présence du premier archevêque de Prague "Arnošt z Pardubic", puis avec l'aide d'icelui après avoir prononcé les fameuses paroles: "dis-donc le moine, et quand t'auras fini de jouer avec le goupillon qui goutte et le sac à main qui fume, tu relèveras ton peignoir et viendra me filer un coup de main pour déplacer cette foutue *$#@+%&! de pierre..." Ceci dit, cet épisode est plutôt controversé par les historiens, car en mai et juin 1348, le bon roi Charles s'en visitait la Moravie dans le cadre d'une remise en ordre de son proche empire (version officielle, officieusement il faisait la tournée des caves vinicoles), aussi il est fort peu probable qu'il ait lui-même assisté (et encore moins probable qu'il ait lui-même participé) à la pause de cette foutue *$#@+%&! de pierre.
La construction commença par l'indispensable, et du bas vers le haut (topographiquement). Au plus bas du château donc: la tour du puits (qui n'en est pas un, c.f. plus loin) afin que l'on ait à boire. Ensuite l'on construisit la maison du burgrave et les dépendances, parce qu'un château sans concierge, sans hommes d'armes, sans larbins, ben c'est pas vivabitable. Vint ensuite le palais royal, la tour mariale (et sa chapelle dédiée à Ste Marie), la grande tour qui est un fort en soi à l'intérieur du château avec ses 25 x 17 m de surface, une épaisseur murale moyenne de 4 m, et jusqu'à 6 m côté nord, en prévention des Suédois. Et dedans la grande tour, se trouve la fameuse chapelle St Croix (c.f. plus loin). Les gros travaux furent terminés en 1355, puis l'on attaqua la décoration intérieure comme extérieure. Le 27 mars 1357 le bon roi Charles IV se rendit au château en compagnie de ses saltimbanques afin d'y fonder le chapitre (de "Karlštejn"), et c'est à partir de cette date que l'on considère la mise en service officielle du castel. Signalons cependant que les tours furent réellement achevées qu'en 1360, et la fabuleuse chapelle de la Ste Croix qu'en 1365, mais y avait du boulot dessus aussi, donc c'est pour ça.
Bien, mais passons un peu en revue la position géographique de notre édifice. Tout d'abord vous remarquerez (si vous y allez) que contrairement au commun des châteaux (mais à l'instar des champignons des bois), celui-ci est pratiquement invisible de loin, car rien ne trahit sa présence si vous ne vous trouvez pas à moins de 250m de ses murs. C'est grâce aux 4 petites collines qui entourent savamment l'édifice: "Kněží hora" (357m), "Haknova" (402m), "Plešivec" (362m), "Prostřední vrch" (383m). Bon, exception faite si vous allez jouer au golf de "Karlštejn", d'où j'ai pris les photos éloignées. Là, vous voyez le château d'environs 1,5 à 2km, mais n'oubliez pas qu'au XIV ème siècle, personne ne jouait au golf en Bohême (à cause du prix), et qu'à la place du gazon coupé à l'anglaise, se trouvaient des forêts drues velues bouchant la vue aux ennemues, eh viu (et empêchant aussi de jouer au golf). Ensuite l'accès vers l'intérieur du château fut conçu fort ingénieusement, obligeant l'éventuel belligérant à contourner l'édifice sur un étroit chemin abrupt d'ouest en nord, passant par le sud et l'est, tout autour de la grande tour du haut de laquelle les défenseurs se faisaient un malin plaisir de tirer, jeter, lancer, lâcher, décocher, catapulter, un tas d'objets, de matières et de liquides les plus divers sur les pauvres bougres d'en bas (y en a même qui crachaient, alors que c'est interdit).
Après?
Ben après la fin du règne de notre bon roi Charles IV, la grandeur de notre forteresse déclina. D'abord parce que son fils "Václav IV" n'en avait guère à fiche (il construisait ses propres châteaux), et ensuite parce que lors des guerres hussites, les burgraves (et donc le château) soutenaient la cause catholique, c'qui n'était pas une bonne idée. D'ailleurs malgré que le bon roi Charles eut fortifié l'édifice comme aucun autre (roi et 10 fils... édifice), devant l'incertitude des aléas du hasard, non seulement le souverain s'y rendit guère, mais même les joyaux de la couronne furent maintes fois déplacés (le plus souvent à Vienne), des fois que la forteresse
Y a quoi d'dans?
Ben dedans, y a des pièces à voir, et dans les pièces, parfois même des trucs. Mais j'ai pas le droit de traduire, alors chais pas si je peux vous en parler en Français parce que mon guided tour était en Anglais. Allez, si, je vais en parler... Mais avant tout, juste une info sur le gaillard qui nous menait, car il était fort sympathique, souriant, affable, et pour une fois, ne récitait pas monotonement son texte. Bravo p'tit gars, c'était bien, vraiment. Donc nous sommes entrés dans la pièce du rassemblement d'andouilles dont nous étions, moi et mes 2 petites Américaines, eh oui, encore... Parenthèse: non maman, je t'assure qu'il n'y a rien entre elles et moi. C'est purement de l'amitié, de la sympathie, et nos relations sont exclusivement culturelles et urbaines. J'aime ma chérie d'amour à moi, et je ne suis pas une bête primitive instinctivement mue par une impulsion chimique provoquée par des milliers de phéromones savamment expulsées dans l'organe voméronasal de mon reniflard par les glandes apocrines situées sous les aisselles, autour des mamelons et dans les aines de ces 2 femelles. Je t'assure donc, rien que du culturel et du naturel-bio. Fin de parenthèse. Apparemment, cette pièce servait de rassemblement à l'escorte d'accompagnement du roi lorsqu'il partait en balade. A voir: la carte de l'empire du bon roi Charles IV lors de son règne, et une maquette du château de "Karlštejn" tel qu'il devait être au XIV ème siècle (selon les fouilles archéologiques). Ensuite nous passâmes dans la salle des chevaliers (ou des vassaux). La première chose que vous verrez, ce sont les armoires dans lesquelles les gaillards rangeaient leurs fourbis, armes et St frusquin. Les portent sont peintes des armoiries de chaque bougre, afin qu'ils ne pussent se planter, et enfiler les collants d'un autre. Ensuite vous y verrez des malles totalement quelconques, qui contenaient des archives totalement importantes. Et avant de quitter cette salle, vous mettrez encore un oeil dans la chapelle St Nicolas, dont je ne me souviens plus de ce que dedans il y a. Enfin si, quelques statuettes, un tableau, mais chais plus ce qu'ils représentent, ce qui est sans doute la preuve que ce n'est pas spécialement important. La salle des ancêtres, alors là c'est top, z'allez vous marrez grave. D'abord parce que les tableaux datent du XVII et XVIII ème siècle, donc aucunement de l'époque dont on se cause (fin XIV ème siècle pour ceux qui ne suivent pas), ensuite parce qu'ils représentent des ancêtres supposés de notre bon roi Charles (du côté de sa maman, "Eliška Přemyslovna") dont l'histoire n'est pas vraiment sûre (qu'ils aient historiquement existé, les ancêtres), alors pour leur dessiner une trombine, fallait vraiment une bonne dose de fantaisie. Tout commence donc avec l'ancêtre et guide "Čech" qui mène sont peuple en bohême, mais ce n'est pas un ancêtre génétique, donc il n'est pas peint. Puis la lignée débute avec sont successeur politique "Krok", ses filles "Kazi", "Teta", "Luboša" ("Libuše") son mari "Přemysl", et leur descendance "Nezamysl", "Mnata", "Vojen", "Vnislav", "Křesomysl", "Neklan", "Hostivít" jusqu'au "Bořivoj Ier", le premier dont on est formellement certain qu'il ait existé. Ca c'est selon la généalogie établie par le grand "Kosmas" (Cosmae pragensis) et complétée par "Dalimil" puis "Přibík Pulkava z Radenína". Ceci dit, et je le répète, il y a de forts doutes sur ces princes mythiques car le texte contenant ces noms est obscur, mal écrit, et pourrait être un fragment d'une phrase cachée plutôt qu'une liste de noms. Mais dans la salle, ils y sont, peints, les principaux. Chais plus vraiment lesquels d'ailleurs, "Krok" ou "Přemysl" me semble-t-il, puis "Bořivoj Ier". Enfin c'est pas grave, mais ce qui est sûr, c'est que contrairement aux tableaux de Habsbourg, on ne voit aucune séquelle de l'héritage consanguin sur leur faciès :-)
Dans le fond de la pièce des ancêtres, se trouve la salle à bâfrer. L'accès y est impossible, donc vous devrez faire la queue derrière les empotés pour mettre la tête dans l'encadrement de l'étroite porte qui sépare les 2 pièces. Puis vous arriverez à la salle d'audience. Celle là elle vaut vraiment le coup. D'abord pour les boiseries, aux murs comme au plafond. La plupart sont d'origine et avaient pour but de réchauffer la salle, enfin la protéger des murs froids (z'auraient mieux fait d'acheter des radiateurs). Ensuite vous y verrez des restes de fresques murales, d'époque aussi. Ensuite, hop vous passerez directement dans la chambre à coucher du bon roi Charles IV. De longues draperies recouvrent les murs, elles sont fausses (enfin pas d'époque), et leur fonction était, comme précédemment le bois, de réchauffer la pièce (toujours pas de radiateur). Vous n'y verrez pas le lit royal, y a plus, mais vous y verrez la petite chapelle, avec un retable diptyque de voyage (portatif, mobile) peint par "Tommaso da Modena" (peintre à la cour) car notre bon roi Charles était un cul bénit et papiste convaincu. Est-ce également pour cette raison qu'il fit aménager les escaliers qui montent dans la chambre de la reine (ou de la bonne) à droite de cette chapelle? Genre une prière, une pipe, et au lit? Ensuite vous passerez dans une petite pièce, qui servait fort probablement à la garde personnelle du roi sous le bon Charles, mais qui fut transformée par la suite en boudoir (ou bureau) pour le chapitre du castel. Remarquez l'imposant crucifix qui daterait des années 1420, les divers jeux de société sous vitre du XV ème siècle, ou encore les aisances primitives desquelles la matière tombait le long du mur au bas de l'édifice sous l'effet de la pesanteur.
Pis vous passerez à la tour Mariale, au premier étage car c'est le seul qui se visite. Bien que cette salle ait servi à tout et à rien, genre stockage de fourbi qu'on ne savait pas où mettre ailleurs, ce n'était pas la salle aux trésors qu'elle est aujourd'hui. Alors dans les trucs fantastiques, enfin moi j'ai trouvé, c'est la fabuleuse collection de chasubles du XV ème et XVI ème siècle. C'est dément, approchez-vous bien près, et regardez bien les détails, les broderies, les fils qui maintiennent les perles. Imaginez seulement un instant le travail, la sueur, et le talent que cela devait représenter derrière? Parce qu'aujourd'hui par exemple, vous dessinez vaguement une chasuble au bic noir sur le dos d'un ticket de métro, dans un bistrot, hop, Allah va vite... à la akbar... enfin rapidement. Puis vous photographiez le croquis à l'aide de votre téléphone portable, et bazardez en Chine via Internet Mobil un Email laconique en anglais approximatif, l'image en pièce jointe. Vous patientez 5 jours, et au matin du 6 ème sont livrés en express devant votre porte les premiers échantillons d'une combinaison de plongée antiatomique pour archidiacre nauticosportif parce que le petit niacoué assis devant l'ordinateur en Asie la tête en bas n'a pas tout compris à votre commande. Mais c'est pas grave, ce que je veux dire, c'est qu'aujourd'hui, en à peine plus de temps qu'il n'en faut moins pour le faire, et bien vous pondez un modèle complexe de n'importe quoi, vous mettez l'industrie chinoise en branle, vous fabriquez du kilo à la tonne, et vous distribuez worldwide le plus inutile de n'importe quel machin, comme une chasuble par exemple. Alors qu'avant... Ensuite il devrait y avoir aussi l'armure (enfin un bout de l'armure) de St Venceslas. Bien sûr, c'est sans garantie aucune, parce que mille ans en arrière, qui sait à qui elle a vraiment appartenu... Vous verrez également des bouts d'extraits de fresques qui se trouvaient auparavant dans les escaliers menant à la chapelle Ste Croix, des angelots flottant dans les airs et jouant de la musique pour accompagner le pèlerin. Et le truc le plus faramineux, c'est le crâne d'un grocodile tout bête, tout simple (du Nil semblerait-il, souvenir de croisade), et que le bon roi Charles IV avait acquis en son temps comme la relique du dragon cracheur de feu qui fut terrassé par St Georges en personne. Je me demande combien il a payé ça, le bon roi naïf? Vous terminerez la visite par la prison, qui est aujourd'hui transformée en Souvenirs-Shop accessible par un petit pont levis. L'intérêt principal ne sont bien évidemment pas les souvenirs, mais le plafond en traverses de bois de la fin du XV ème siècle, l'un des plus anciens (sinon le plus ancien) plafond de ce type encore conservé d'origine.
Ensuite il reste des trucs à voir, mais ceux-là vous pouvez les voir même sans payer, car c'est hors du circuit payant. Mais défense de traduire, n'oubliez pas. Donc commençons par la tour de l'horloge. Evidemment, vous y trouverez, à l'étage du haut, encore des souvenirs, super, mais si vous descendez les escaliers en bois, juste à gauche de l'entrée, alors vous arriverez dans la pièce de la cloche de Ste Catherine. Bon, sympa, ok, et il semblerait qu'elle soit encore utilisée dans les grandes occasions. Ah bon? Ensuite il y a la tour du puits, et celle-là mérite le coup d'oeil au moins pour le mécanisme unique qui permettait de remonter l'eau. En fait c'est une grande roue en bois d'un diamètre de quelques 3 m, et ça fonctionne sur le principe des roues pour les cureuils ou les cochons-dindes, que vous avez dedans la cage. Autour de l'axe s'enroule une corde, avec en son bout un sceau d'une contenance de 70 litres, permettant d'atteindre la profondeur de quelques 80 m. Il fallait environ 10 minutes pour descendre le sceau, remuer la corde pour remplir le récipient, puis remonter le lourd fourbi vers le haut. Par contre ils ne disent pas combien de cochons-dindes ils avaient besoin pour faire fonctionner l'attirail. L'autre truc, c'est que le puits n'est pas un puits. En fait il s'agit d'un réservoir creusé dans la roche, et alimenté par un petit ruisseau coulant à l'ouest du château. L'on avait artificiellement creusé une petite galerie souterraine (de 40 m) pour détourner une partie du ruissellement, et en l'époque, c'était un secret extrêmement bien gardé car d'importance stratégique en cas d'assiégement de la forteresse.
Anecdotes et historiettes?
Ah ben ça, y en a tout plein qui s'y rapportent au château des historiettes, mais faut faire gaffe, parce que toutes ne sont pas intéressantes. Il y en a même des qui sont carrément chiantes. Bon, moi y en a une qui me fait bien marrer parce qu'elle est liée... enfin z'allez voir. Tiens, lorsque le château fut officiellement intronisé, et lorsqu'on créa le chapitre de "Karlštejn", il fut clairement mentionné que la chapelle de la Ste Croix, originellement appelée de la passion du Christ et de ses instruments... dis-donc (parenthèse) c'est vachement gore quand même le catholicisme, cette espèce de complaisance et de perpétuation de la souffrance, du supplice... chais pas, ça me semble quelque part malsain, pervers, presque obscène (sado-maso)... bref... donc il fut clairement mentionné que la chapelle serait strictement interdite aux femmes. Ah bon?! Remarquez, on leur interdisait bien les brasseries et la mayonnaise parce qu'elles faisaient tourner les produits, alors pourquoi pas les chapelles, après tout, même un moine peut tourner (au moins la tête, pour peu que la dame soit bien nichue :-) Et donc selon la légende populaire, tout le château était interdit aux femmes (mais c'était pas vrai, juste la chapelle, et la brasserie, et la mayo... et la traduction). De là est donc née par exemple une pièce bouffonne spécialement écrite pour le nouveau Théâtre National par le grand "Jaroslav Vrchlický", intitulée "Noc na Karlštejně" (une nuit à "Karlštejn" en 1884), et dont l'intrigue principale est la présence de femmes (dont celle du bon roi Charles IV) dans l'enceinte du castel. J'en profite également pour vous mettre sous les zyeux un fantastique poème scatophile écrit par le même "Jaroslav", "Balada o hovně" (balade à propos d'un étron) où l'auteur présente ses réflexions sur un presse papier en forme d'étron, cadeau reçu d'un ami qui avait assurément du goût. Malheureusement c'est en Tchèque, et je ne sais même pas s'il existe une traduction française. Dommage, c'est beau. Tiens, pour vous donner une idée, vague, parce que je ne suis pas pouêt, mais ça pourrait sonner comme quelque chose dans le genre de:
Intro...
Sur ma table et depuis peu, repose un objet marrant,
c'est la réplique fidèle, d'un étron humain luisant.
Détendu en soirée, souvent sur l'étron je me recueille,
je me marre et verse une larme, lorsque je le porte à l'oeil.
[...] Là, je ne vous le fais pas, parce que c'est long, plaisant mais long, et comme chuis pas pouêt, et qu'en pouêsie chuis un amateur...
Conclu...
Ainsi qui vit ici-bas, l'étron devrait respecter,
car à quoi bon les millions, si l'homme ne peut pas chier?
Mais une chose me ravit, en l'étron je trouve vertu,
dans la merde nous sommes égaux, sans aucun malentendu.
Qu'il fut chié par le vulgaire, ou par un vaillant général,
l'étron conserve sa forme, et embaume le miasme fécal.
Quant au quidam, qu'il soit grand Sieur, ou mendigot quémandant,
qu'est-il de plus pour cet étron, qu'un rustique sac-à-merde vivant?
Alors j'entends déjà certains lecteurs m'envoyer des messages de réprobation, que c'est scato (oui), que c'est grossier (peut-être), que c'est indécent (selon le point de vue). Bon, ben et alors? Que voulez-vous, d'abord c'est pas de mon cru, ce n'est qu'une très imparfaite interprétation du texte originel (et nal... original) du grand "Jaroslav Vrchlický", et donc plutôt que de vous en prendre à moi si vous y voyez la moindre offense, je vous invite à vous retourner contre le talentueux auteur en personne, "Jaroslav Vrchlický", cimetière de "Slavín Na Vyšehradě, Štulcova, 120 00 Praha-Vyšehrad, Czech Republic". Et afin de n'oublier personne, j'aimerais également remercier "Dana" d'Helvétie (oh si...) qui eut la gentillesse et la sagacité de porter ce texte à ma connaissance. Bien, donc retour à la légende et à la pièce de théâtre.
En fait, dans la pièce de théâtre (et la légende), l'épouse du bon roi Charles n'était autre que sa dernière et quatrième femme, "Alžběta (i.e. Eliška) Pomořanská" (Elisabeth de Poméranie). Et un jour donc, après avoir lu Simone de Beauvoir, la reine excédée par les interdictions faites aux femmes (de traduire aussi?) décida de ne plus se raser, ni de se laver, ni de faire le sexe avec son Charles tant que les interdictions ne seraient pas levées. Et elle finit par avoir gain de cause après 2 ans, 9 mois, et 17 jours (sauf pour le droit de traduire, celui-ci perdure encore aujourd'hui). Faut dire que la bougresse avait, en plus du crin et du fumet, de la poigne, au point que le chroniqueur de l'époque, "Beneš Krabice z Weitmile" (parfois "z Veitmíle" ou encore "Benessii Krabice de Weitmile") écrivit dans ses Chronica ecclesiae Pragensis, qu'elle était capable de tordre de ses robustes paluches le fer à cheval d'un obèse percheron. Ca fout les boules! A se demander si elle n'en avait pas (des boules). Dis-donc Charles, t'avais pas peur dans le lit conjugal?
Une autre historiette (bête) raconte que les diables n'apprécièrent pas les desseins karlštejniens du bon roi, qu'ils lui firent les 400 coups pour l'escagasser, qu'ils s'enracinèrent dans la forêt afin d'harceler le voyageur, mais qu'un subtil berger en débarrassa le pays en les aguichant avec des pois salés (?! c'est con un diable) dont il se gavèrent goulûment, à la suite de quoi ils eurent soif, burent comme des sans (soif), puis explosèrent lorsque les pois commencèrent à germer dans leur grosse bedaine toute gonflée, et que le roi fit du berger un riche et noble chevalier de "Karlštejn". Mais sérieusement, cette histoire je ne vais pas vous la raconter parce qu'elle est d'une sottise, même pas drôle, d'un fanatisme idéologique qu'il est impossible qu'elle n'ait pas été inventée par la race des curés.
Il en est une autre d'historiette dans la même veine, qui parle d'un pauvre ménestrel aveugle et de son fidèle gros kiki poilu (canidé) qui se trouvaient toujours à l'entrée du château, sauf lorsque le roi "Václav IV" (le fils du bon roi Charles IV) les faisait mander en son palais afin de raconter (le ménestrel, pas le kiki) aux convives du banquet les histoires drôles qui faisaient bidonner l'assistance, mais qu'un jour un méchant voulu empoisonner l'invité du roi, le Sieur Bernhard, à l'aide d'une coupe de vin empoisonné, et que le kiki renversa la coupe, lapa le vin au sol, et trépassa dans la minute, sauvant la vie du Sieur qui découvrit le malfrat, le fit décapiter, puis que le pauvre aveugle inconsolable partit à l'aventure avec le Sieur Bernhard en sa contrée, mais qu'il n'alla pas bien loin (forcément, sans son fidèle gros kiki poilu), et qu'il décéda à "Litoměřice" où le Sieur le fit inhumer en l'église St Michel, et qu'il fit construire une colonne à l'effigie des 2 inséparables compagnons. Mais sérieusement, cette histoire je ne vais pas vous la raconter non plus, parce qu'il n'existe plus aucune trace ni de la colonne de l'aveugle détruite par un tremblement de terre en 1511, ni de l'église St Michel détruite au début du XIX ème siècle. Enfin cette fois c'est pas la faute des curés.
Et la chapelle de la Ste Quoi?
Alors la chapelle de la Ste Croix, ne se visite que sur réservation, et rien que. Donc si vraiment vous y tenez, et je vous le conseille vivement (bien que je n'y sois pas allé récemment), téléphonez à la Vence. Ce fantastique joyau serti d'or, de pierres (semi) précieuses et de tableaux gothiques est d'une richesse phénoménale, mais sa fragilité justement limite le nombre de visiteurs afin d'y maintenir le climat adéquat. Je vous ai trouvé quelques photos sur le Net afin que vous vous fassiez une idée. Quelques mots sur maître Théodoric ("mistr Theodorik, Mgr Theod, Magister Theodoricus, Theodoricus pictor, Theodoricus de Praga ", mais aussi "Dittrich, Dětřich, Jetřich". C'est le plus ancien peintre gothique en Bohême dont on connait le nom. Il rentre au service du bon roi Charles IV en l'an 1359, et laisse derrière lui la plus fantastique collection au monde de portraits gothiques de son époque. Les peintures de la chapelle de la Ste Croix représentent des personnages ayant vécu ou non, des saints, des martyrs, de papes, des évêques, des soldats de la légion de Thèbes... c'est énorme de beauté. Je vous ai trouvé quelques oeuvres du maître, son autoportrait, et des exemples de restauration de son oeuvre splendide. L'originalité de maître Théodoric par rapport à ses contemporains réside principalement dans les visages. Loin du schématisme alors en vogue, les traits des visages théodoriciens sont expressifs, profonds, presque vivants... au point que la légende raconte que le bon roi Charles IV en personne entrait nu-pieds dans la chapelle, par respect aux personnages qui le dévisageaient.
Et pour terminer sur cette splendide chapelle dont je recommande vivement la visite, principalement pour les peintures de maître Théodoric (que j'ai vues il y a quelques années de ça dans la galerie nationale du couvent Ste Agnès), donc pour terminer, signalons que la chapelle fut entièrement restaurée pendant 19 ans, et à nouveau ouverte en l'an 2000 avec la bénédiction de notre cardinal praguois "Miloslav Vlk".
Pis voilà, quoi
Signalons encore que le patelin "Karlštejn" dans lequel vous arriverez, garerez chèrement votre voiture (70 CzK, indépendamment de la durée), éventuellement vous restaurerez et achèterez l'un (ou plusieurs) des milliers de souvenirs moches, inutiles, stupides, voire sexuels (si si, il y a un sex-shop au début de la rue passante montant au château) dont vivent les quelques 750 résidents permanents, donc ce patelin est administrativement né en 1952 par la réunion des sous-patelins "Budňany" et "Poučník". Je vous ai trouvé une vieille carte militaire de l'empire Austro-hongrois (entre 1842 et 1852) où ils sont mentionnés respectivement sous "Budnian" et "Paučnik". Mais ce qui est intéressant, c'est l'étymologie des noms des localités qui datent de l'époque de la construction du château (1348). En cette époque, sont venus sur place des centaines (milliers?) de travailleurs, artisans, qui vivaient sur place. Et avant de se construire des maisons en dur, en bonne pierre, ils vivaient dans des cabanes (au Cabana). Et "cabanes" en Tchèque se dit aujourd'hui "Boudy" (mais en morave par exemple toujours "bůdy"), et de là sont nés "Budňany", les habitants des cabanes. Et "Poučník" alors? "Poučení" signifie "enseignement", "instruction", tandis que "poučený" est celui qui fut enseigné, instruit. On peut en conclure que "poučeník" (devenu "Poučník") était l'instructeur, l'enseignant, soit le maître artisan. Et si vous regardez sur la carte, vous y verrez également mention d'un patelin "Klucitz" au sud-est de "Paučnik" (aujourd'hui disparu). Certes, "klučit" signifie "défricher", mais si vous le mettez en relation avec le maître artisan ("poučeník") alors "Klucitz" pourrait venir de "klučík" (petit gamin, bonhomme) voire "kluci" (mômes, gosses) soit "l'apprenti". Puis au sud-ouest, assez loin de "Paučnik" et de "Klucitz" se trouve "Krupna". Et "Krup" signifie en Tchèque la même chose qu'en Français: "croup: localisation laryngée de la diphtérie, maladie infectieuse contagieuse, pouvant entraîner la mort par asphyxie." Donc "Krupna" devait être le village des contagieux: diphtérieux, lépreux, choléreux, bref... des souffreteux indésireux. C'est dingue comme on peut reconstruire les choses avec des fragments de machins.
Pour les picrateux, signalons aussi que dans les trucs à souvenirs (au château, comme le long de la route qui y mène) vous pourrez trouver de la vinasse des coteaux de "Karlštejn". Ce cépage a été rapporté de Bourgogne par le bon roi Charles IV, et vous en trouverez l'histoire commentée dans le récit de "Jan Neruda" (en bas de page). Et malgré que de prime abord, notre bon roi trouva le cépage verjuté, il en ordonna néanmoins son élevage intensif en 1358 sur les collines de "Vinohrady" (à Prague), derrière les fortifications de la ville, octroyant détaxe et privilèges aux vignerons afin d'en favoriser la culture (comme quoi l'Union n'a rien inventée en matière de
Toujours le long du presque 1,5 km qui mène à pieds au château, se trouvent des kilomètres de restaurants. D'expérience je peux vous dire que j'y ai toujours bien mangé (dans 4 d'entres-eux), et pour des prix très raisonnables (moins de 150 CzK, 5,30 €). Rien à voir donc avec les pièges de la place Venceslas ou de la rue "Nerudova" (qui monte au château de Prague à partir de "Malostranské náměstí"). Ceci dit, jetez un oeil sur la carte avant de vous asseoir, on ne sait jamais avec ces bougres de cochons vivant du tourisme.
Et pour vraiment terminer, à seulement 12 km du château fort se trouvent les "Koněpruské jeskyně", qui sont des grottes naturelles avec toutes les stalagmites et stalactites qui vont bien. Moi je n'y suis pas encore allé, mais ma chérie si, et elle recommande vivement la visite, donc si jamais vous sortez trop vite du château, et qu'il vous reste 2h avant de rentrer sur Prague, ben voilà, genre une idée pour éreinter définitivement les chiards et la belle-mère, puis filer sereinement au bistrot avec les potes.
Commentaires
l'interdiction de traduire n'est pas récente, c'est même un vestige des temps anciens. j'ai été accueillie par un cerbère innommable. Les visites étaient en tchèque en anglais et peut être en allemand. Je demande (en plaisantant)comment faisaient les Français et le malpoli m'aboie que nous pouvions repartir, qu'ils avaient suffisamment de visiteurs.... J'adore ce type d'accueil, la visite ne m'a pas déçue non plus, faite au pas de course avec une guide qui n'en avait rien à faire.Les salles entrevues en vitesse avec des attentes interminables entre deux salles.
Personnellement bof