Ville: Fantova kavárna à la gare centrale

Alors que Prague soit un musée architectural à ciel ouvert, je vous l'avais déjà dit pas mal de fois me semble-t-il.
Et justement, dans ce cadre-là, et parce que l'on termine tout récemment la reconstruction d'un édifice exceptionnel de style Art nouveau de la gare centrale de Prague, je vais vous parler aujourd'hui du hall central plus connu sous le nom de "Café Fanta" (et ça n'a rien à voir avec Caca Cola).

Historique
Alors comme chacun sait, le rail est relativement récent, et donc la première gare à l'emplacement de l'actuelle fut construite à partir de 1869 par les architectes "Vojtěch Ignác Ullmann" (et non "Josef Ignác Ullmann" comme certaines sources mentionnent bêtement) et "Antonín Viktor Barvitius".
Eh oui mais attends, je me souviens que je vous en avais déjà parlé, de l'historique de la gare centrale, juste-là. Bon, ok, c'est pas récent comme publie, mais l'historique de la gare n'a pas changé depuis. Alors je vous laisse lire, et je passe à la suite.

Le café Fanta
Tout d'abord faut que je vous dise que la gare fut suggérée par l'architecte "Josef Fanta", qui était de surcroît charpentier (enfin concepteur de meuble), peintre, conservateur de monuments historiques (à ses heures perdues) et mécènes (lorsqu'il dépassait le plafond raisonnable d'imposition).
Elève de "Josef Zítek", et bon pote d'avec, ce qui lui fut fort utile par la suite, il est considéré comme l'un des plus grands architectes de l'art-nouveau, bien que ses détracteurs lui pourrissaient la vie au prétexte que ce style était largement dépassé. Et malgré que la gare-nouveau... la gare art-nouveau... donc... architecturée par "Josef Fanta"... le café quant à lui, fut simplement suggéré, esquissé mais parachevé dans une certaine mesure par le constructeur "Čeněk Vincenc Gregor". Dans quelle mesure "Čeněk" apporta son génie aux ébauches de "Josef", l'histoire ne l'a point retiendu. Les sgraffites, mascarons, bas-reliefs et statues sont les oeuvres des sculpteurs "Stanislav Sucharda", "Ladislav Šaloun" et "Čeněk Vosmík" que je ne vous présente plus, tellement ils sont connus tous plein de partout (en particulier dans mes publies). Les peintures (et les couleurs) sont de "Viktor Stretti" et de "Václav Jansa" (qui eut la fabuleuse idée de réaliser moult aquarelles de la ville de Prague avant son assainissement, aquarelles d'une valeur historique incommensurable maintenant que les édifices ne sont plus).
Malheureusement, pour les splendides vitraux, la boiserie, la ferronnerie, les annales sont muettes quant aux auteurs. Dommage, c'est énorme de splendeur et d'origine (en particulier les vitraux art-nouveau au-dessus de l'horloge).

Sinon avant d'être un café, le "Café Fanta" servait de hall d'accueil, genre c'est là que tu achetais tes billets. Mais c'est surtout là, que tu entrais en contact avec la gare pour la toute première fois. Et comme chacun sait, les premières secondes sont cruciales: Monsieur de Talleyrand disait "méfiez-vous de la première impression, c’est toujours la bonne" (et ma femme de ménage de rajouter "surtout lorsqu’elle est mauvaise"). Aussi le hall d'entrée se devait d'être splendide, majestueux, coupe-souflesque et bras-tombantant. Et il l'était, le hall, fabuleux. Il l'était jusqu'à ce que les con-munistes construisent l'immonde hall sous-terrain dans les années 70 et fassent passer la "magistrála" (l'infâme autoroute qui passe en plein centre-ville) devant la gare. Alors l'ancien hall devint café, et perdit de sa splendeur.
Vous pouvez admirer les photos sur mon ancienne publie, afin de vous rendre compte à quel point ce hall tombait en ruine que les pigeons y chiaient dedans il y a encore quelques années seulement (véridique). Mais depuis peu, (fin Janvier 2014), il vient d'être fini d'être restaurer, et sa splendeur brille à nouveau sur toute la gare. Pour l'anecdote, notez encore que le nouveau hall d'entrée (des années 70) se trouve dans Prague 1, tandis que la gare de "Josef Fanta" se trouve dans Prague 2, la "magistrála" séparant les 2 arrondissements.

Alors qu'y voyons-nous, dans ce hall de gare art-nouveau? Tout d'abord des blasons. Ils représentent certaines des villes qui étaient desservies depuis la gare praguoise. Les voyageux reconnaîtront de gauche à droite Prague, Florence, Rome, Paris, Budapest, Prague ("bis repetita placent"), Vienne, Moscou, Berlin, Hambourg... et les statues en dessous, symbolisent ces villes. Anecdote, le blason d'Hambourg date de l'Empire français, lorsque les Bouches-de-l'Elbe étaient département français, en 1811, et Hambourg commune d'Empire.
Les 3 abeilles napoléoniennes sur le chef-de-gueule étaient représentées sur les blasons de toutes les "bonnes villes" sous le premier Empire. Alors pourquoi "Josef Fanta" (ou son stucateur?) est allé utiliser en début de XXe siècle un blason du début du XIXe, pas la moindre idée. Par amour de la France?

Notez par contre que le couillon de service (dont je ne mentionnerai pas le nom afin de ne pas l'acculer au mur du ridicule) qui faisait la visite aux journaleux après la reconstruction, est allé leur vendre l'ineptie qu'il s'agirait des blasons des villes tchèques desservies par le rail ("vidíte znaky českých měst, kam se všude cestovalo, kudy vedla dráha z Prahy"). Mort de rire, le "neuer Kaiser-Franz-Joseph-Bahnhof" avait nettement plus d'ambition internationale que de desservir des villes tchèques. Couillon! Vous trouverez cependant cette information (villes tchèques) dans la grande majorité des articles du Net, alors qu'en dehors de Prague, pas un seul blason ne représente une ville tchèque (encore que peut-être le dernier, avec son St Venceslas, mais je ne l'ai pas identifié avec certitude). Bon, ce souci pourrait être anecdotique, s'il n'était pas révélateur d'un phénomène croissant: l'affirmation par les journaleux d'éléments non vérifiés.
Dommage pour la profession. Heureusement qu'il y a Strogoff ツ

La toute nouvelle restauration
A la chute du con-munisme, la gare centrale de Prague commença à se détériorer, d'abord un brin, puis grave, et en début de millénaire, il fallut penser à une nécessaire restauration. Et comme en République bananière notre, rien ne se passe sans dessous-de-table et bakchich, ce sont les Ritals de "Grandi Stazioni" qui obtinrent le contrat. Mon blog étant principalement à but culturel et historique, je ne vais pas vous dévoiler les détails mafieux liés à la malversation, mais sachez que ce contrat pue la charogne, et que les fumiers putrides (côté tchèque) mêlés à cette prévarication ont (ou avaient encore récemment) leur (gros) cul sur un siège parmi les plus hautes sphères de la fonction publique. Bref, et en succinct, le contrat stipule "vous nous retapez la gare" (pour une valeur d'environ 35 millions d'Euro), et "on vous laisse la gérance du lieu pour 30 ans".
Aussi dans les années 2008-2009, ce sont les quais qui eurent droit au dépoussiérage (histoire de montrer un peu de bonne volonté côté rital), suivis du hall nord, où l'on construisit (et pour cause) des commerces (ben tiens), des fast-foods (ben tiens), des presses (ben tiens), des superettes (ben tiens), et l'on augmenta le tarif des chiottes à tel point, que les voyageurs préféraient se payer une consommation forcée afin d'obtenir le ticket-gogues compris dans le prix plutôt que de payer les gogues à part sans consommation. Le "Café Fanta" qui méritait sans doute le plus une réfection urgente fut mis en dernier sur la liste, parce qu'économiquement insignifiant. Ben tiens, on te file pour 30 ans la gérance d'un espace énorme où se concentrent des milliers de personnes chaque jour. Qu'en fais-tu? Un centre commercial, eh oui, comme si Prague n'en disposait déjà pas d'assez, de centres con-merciaux en plein centre-ville. Le "Café Fanta", c'est protection du patrimoine, et le voyageur en train ne va pas payer de son rein gauche pour avoir un café (comme à l'aéroport où le café coûte l'oeil droit). Aussi les Ritals maquillèrent le plus rapidement possible leur vieille pute afin de la fout' au turbin, tandis que le joli café, sans rendement immédiat, il pouvait encore attendre, presque 6 ans.

Et puisqu'on parle d'attendre... que va devenir le parc "Vrchlický" juste devant l'entrée de la gare? Aujourd'hui c'est vert, moyennement propre, mais surtout fréquenté par une conséquente faune interlope plus proche de la cour des miracles que du voyageur mondain, au point que l'endroit est populairement appelé "Sherwood", pour vous dire (Robin des bois était un con-muniste d'avant-garde.
C'est bien une idée bolchevique que de voler les riches pour distribuer aux pauvres non?). Depuis que la gare fut "légèrement" restaurée par "Grandi Stazioni", le coupe-gorge n'est plus infréquentable, cependant vous y rencontrerez toujours une singulière concentration de camés-shootés-zombis, d'ivrognards dégobilleux, de rivettes sodomites comme bougretantes, enfin une concentration de toute la sordide gangrène sociale empuantant le miasme de la misère profonde. Une horreur Thérèse.

Mais retour au "Café Fanta". Il est donc retapé (bien qu'il reste encore quelques mètres carrés en friche, dans l'attente qu'ils sèchent des dizaines d'années d'infiltration d'eau de pluie), et au printemps 2014, au plus tard en été, l'on devrait l'ouvrir en grande pompe, dès que l'on aura trouvé un gérant-exploitant. Du coup, vide, je me dis que j'allais aller y faire quelques photos, la peinture étant encore fraîche, et le quidam absent. Aussi je contactai l'attaché de presse des chemins de fer tchèques, lequel m'informa que le café était libre d'accès, et que l'on pouvait y photographier librement et sans problème. Cool, j'attendis donc un jour ensoleillé, et en fin d'aprèm, me rendis sur place. Ah oui, libre d'accès, et photographiage libre et sans problème!? L'imbécile avait oublié de me signaler qu'un grillage de 2,5 m de haut séparait le hall d'entrée du café, grillage vissé contre le mur et donc infranchissable et surveillé par un vigile, grillage en plein dans le champ de l'objectif dérangeant comme une grappe d'hémorroïdes au cul d'un conducteur de taxi.
Décidemment, l'empathie, le bon sens et la perspicacité ne sont pas des qualités spontanées chez un attaché de presse des chemins de fer tchèques (et je ne parle pas d'intelligence). Du coup, les photos sont au mieux de ce que je pus faire, compte tenu des conditions. J'ai quand même réussi un cliché pas trop mal de l'apothéose sculpturale, des 2 splendides créatures nichues semblant sortir d'un tableau d'Alfons Mucha et qui enjolivent de leur charme sensuel l'inscription "Praga mater urbium" (Prague, mère des villes) entourée de la date du 28 octobre 1918 (naissance de la Tchécoslovaquie). Bon, mais malgré tout, je compte bien y retourner et de faire tout plein de belles photos, une fois le grillage retiré.

Alors comme il n'y a rien d'autre d'intéressant à voir dans cette gare, sinon le "Café Fanta", je ne vais pas vous inviter à vous y ruer fissa fissa, mais si jamais vous passez à proximité, sachez qu'il existe, et qu'il mérite un jet d'oeil, juste là: 50.0831506N, 14.4353481E.

Commentaires

Delf a dit…
oh la la ! ! Que c'est beau ! que c'et beau !
j'attends les prochaines photos avec grande impatience !
Strogoff a dit…
Dès que ce sera ouvert Delf, dès que le café aura son gérant... Photos à viendre...
clémentine a dit…
j'attends aussi pour la date d'ouverture et vos photos pour y admirer aussi " les vitraux art-nouveau au-dessus de l'horloge "
Strogoff a dit…
En fait, ils sont déjà visibles depuis le hall. Mais il est vrai qu'avec un peu plus de recul, une fois le café ouvert, ils seront encore plus resplendissants.
Hana de Prague a dit…
Dane, máš fakt moc hezké fotky. A hlásím, že díky tvému blogu jsem tam už byla taky. Úplně mi uniklo, že už je rekonstrukce dokončená, a jsem ti vděčná za info. (Ten plot tam pořád ještě překáží).
Strogoff a dit…
Jeee Hanko, dekuji za chvaleni :-) Nu, ten plot tam asi bude dokud neotevrou tu kavarnu. Jsem zvedavej co tam zavedou za podnik. Uvidime, nechme se prekvapit.

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