Ailleurs: St Martin, St Erhard et Ste Ursule à Cheb
Eh ouais, alors forcément, les Allemands ne s'y intéressent pas parce que c'est en République tchèque, et les Tchèques ne s'y intéressent pas, parce que c'est d'origine allemande. Et pourtant, la chapelle St Martin, St Erhard (variante germanique de Eberhard, sans doute Evrard en Français) et Ste Ursule est une splendeur unique d'envergure mondiale du style roman appelé "art staufien" (de "Hoenstaufen", famille impériale qui régna sur le St Empire Romain Germanique comme sur l'Italie entre la mi-XII ème et la mi-XIII ème siècle).
Cet exclusif joyau, par chance préservé jusqu'à aujourd'hui, se trouve en la ville libre d'empire, puis ville royale
d'Egra ("Cheb" en Tchèque et "Eger" en Allemand), au tout au bout ouest de la République, à seulement 5 km de la frontière d'avec la Bavière. Evidemment, je me doute que peu d'entres-vous connaissent ce bled de 35.000 habitants, sinon que vous en auriez éventuellement entendu parler en 1634, puisque cette effroyable fripouille d'Albrecht Wenzel Eusebius von Wallenstein y fut assassiné. Et pourtant, Egra est une ville d'architecture fabuleuse, historiquement riche, et mérite assurément une visite de plusieurs jours. Pour info, et pour ceux qui se rendraient à Karlovy Vary ("Karlsbad") en voiture, Egra n'est distant que de 40 km par autoroute, et historico-culturellement il y a nettement plus à voir qu'à Karlovy Vary (qui n'est pas à jeter non plus pour autant avec l'eau thermale du bain, attention, j'ai pas dit ça).
Les origines
La préhistoire du lieu remonte au IX ème siècle, lorsque les premiers Slaves habitèrent céans, vivant de la cueillette des patates crues et de l'élevage du mammouth à poil. Ce fait est avéré car sur l'emplacement de nôtre édifice catholique, se trouvait un cimetière païen plein d'os humains, de mammouths et de patates aussi, de cette époque, cimetière découvert récemment lors des fouilles archéologiques. Dans le courant du XII ème siècle, et compte tenu de la faible densité de population comme de l'éloignement de la capitale Prague, l'influence des Přemyslides (famille régnante sur la Bohême) s'affaiblit, au point de disparaître au profit de la marche Nord bavaroise. Au départ, simple petit fortin slave en bois, les Germains transformèrent au fur et à mesure la colonie en château-fort germain en pierre. Ce dernier devint en 1179, et sous la diligence de l'empereur Frédéric Barberousse (grand-père de Frédéric II, cf. plus loin) palais impérial ("Kaiserpfalz", "pfalz" du latin "palatium"), avec son bergfried cylindrique, son palais (résidence de l'empereur), sa chapelle, ses dépendances, ses remparts, etcétéra, etcétéra... Aujourd'hui il ne reste guère à voir de ces édifices d'origine, sinon des ruines, et nôtre chapelle St Martin, St Erhard et Ste Ursule est ce qui reste le plus mieux conservé de cette période.
La toute première mention de la chapelle se trouve dans la bulle d'or d'Egra du 12 juillet 1213, qui règle (encore) des histoires de pognon (encore), de domaine (encore) et de privilège (encore) entre le haut clergé (évêques, archevêques et pape) et la haute noblesse (empereur, rois et vassaux): "Acta sunt haec anno domini nostri Jesu Christi 1213, indictione prima, regnante domino Frederico secundo Romanorum rege glorioso et rege Sicilie, anno regni ejus Romani primo, Siciliae vero 16. Datum apud Egram per manus Bertoldi de Niffen, regalis aulae prothonotarii, quarto Idus Julii. In nomine sancte et individue Trinitatis. Amen. [...] bla bla bla, bla bla bla [...] Actum in capella in castro Egre, anno dominice incarnationis MCCXIII. IV Idus julii, indictionis prime". Alors bon, ok, la chapelle n'est pas mentionnée nominativement, mais dans le château, y en avait qu'une de chapelle (comme le gogue, en ces temps il n'y en avait qu'un par château, ce n'est que bien plus tard que l'on se mit à employer le pluriel pour "gogues"), donc ça ne pouvait pas en être une autre que la nôtre, de chapelle. Ceci-dit, et comme précédemment-dit aussi, malgré que la première mention date de 1213, la construction, elle, remonte plus loin, un peu, en fin du XII ème siècle.
L'un des Frédéric II
En fait, le pondeur de la bulle, l'empereur romain germanique (mais pas encore empereur en cette époque) Frédéric II (petit-fils de Frédéric Barberousse) avait un faible pour le castel d'Egra, où il passait le plus de temps possible (c'est pour vous expliquer pourquoi un texte aussi important fut rédigé dans un trou aussi insignifiant). Sa présence au château est attestée en Juillet 1213 (cf. la bulle), en Juin 1214 (il revint au château après qu'il se fut rendu compte qu'il avait oublié d'éteindre la lumière en partant l'année précédente), en novembre-décembre 1215 (pour le marché de Noël) et en novembre 1219 (pour une partie de chasse organisée par l'amicale des sapeurs-pompiers volontaires). Alors vous me direz que 4 fois, c'est pas bésef, mais si vous imaginez combien un empereur c'est occupé, combien un empereur c'est amené à voyager, combien un empereur se fout des patelins, donc si vous imaginez tout ça, ben passer 4 fois (et peut être même plus) à Egra, moi j'dis que ça fait beaucoup quand même.
Et encore quelques mots sur Fréd. II, alias "Stupor Mundi", qui fut sans conteste un personnage exceptionnel, sinon légendaire. Tout d'abord, faites gaffe à ne pas me le confondre avec d'autres Frédéric II, car il y en eut plusieurs dans le monde, en particulier le Prussien, qui barbota une grande partie de la Silésie à Marie-Thé et fit déverser plusieurs tonnes de boulet sur Prague en 1757 (l'andouille). Le nôtre de Fréd. II fut élevé en Sicile par un père germanique et une mère normande. Nul doute que les nombreuses influences germano-italo-normando-arabo... lui ouvrirent l'esprit comme une huître lequel esprit absorba leurs "substantifiques moelles" (aux influences) comme une éponge. La "stupeur du monde" était curieux de tout, supra-lettré, multi-lingue, hyper-philosophe, archi-tecte, as-trop-logue, al-chimiste... ah l'cochon brillant... Mais il ne savait cependant pas utiliser Fesse-bouc, ce qui lui ferma les portes de la renommée au point qu'aujourd'hui, il est inconnu de la majorité de la population européenne. Et pourtant, regardez-voir tout ce qu'il laissa à la postérité en héritage. On lui doit par exemple le "Castel del Monte" (cf. mes photos), splendide édifice méga ésotérique dont le monde entier se demande aujourd'hui mais qu'est-ce que c'est que donc pourquoi que c'est? Il laissa à la Bohême la fameuse bulle d'or de Sicile, rendant le royaume "propriété héréditaire". Il inventa la fornication immodérément déchaînée, au point qu'il en fut excommunié de l'église catholique par 2 fois (1 fois seulement n'étant pas suffisant). Il faillit même devenir beau-papa d'Agnès de Bohême (qui faillit épouser son fils Henri II de Souabe), mais l'affaire échoua lorsqu'il découvrit que cette dernière ne se rasait pas les jambes (pire qu'une militante féministe). Pour l'anecdote, le papa d'à Gnès de Bohême essaya alors de la marier à un Anglais, Henri III Plantapoireau... Plantagenêt, moins regardant, mais même lui n'en voulut point (il épousa un cycliste, les cyclistes se rasent les jambes, eux). Aussi elle finit par entrer au couvent, et plus spécifiquement chez les clarisses, parce que les poils aux cuisses, elles connaissent bien, les clarisses.
Frédéric II était grand pote avec Leonardo Fibonacci, et les 2 bougres s'admiraient mutuellement. Le mathématicien dédia plusieurs ouvrages de référence à l'empereur, et d'aucuns suspectent ce dernier d'y avoir puisé nombre d'inspirations pour les constructions qui lui sont attribuées. Rappelons par exemple que la suite de Fibonacci (suite d'entiers dans laquelle chaque terme (à partir du 3 ème) est la somme des deux précédents: 0, 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13...) et le nombre d'or (i.e. phi, i.e. divine proportion) sont étroitement liés, puisque les quotients de deux termes consécutifs de la suite de Fibonacci sont la meilleure approximation de phi. Genre lorsqu'on divise un nombre de la suite de Fibonacci par le nombre précédent, ben plus l'on prend un nombre élevé, et plus l'approximation est juste: 5 / 3 = 1.666..., 13 / 8 = 1.625..., 34 / 21 = 1.61904..., 75025 / 46368 = 1.618034..., 2178309 / 1346269 = 1.618033988749648 versus Phi = 1.618033988749894848204586... Le nombre d'or est indissociable de l'homme de Vitruve, du canon beuronien, des proportions de la beauté universelle, des temples grecs, de la Grande Pyramide, des cathédrales. C'est aussi la taille de votre carte bancaire, l'agencement des graines de tournesol, la vitesse de reproduction des lapins... C'est Pythagore, Euclide, Platon, Aristote, da Vinci, Kepler, Ménechme d'Alopeconnesus, Eudoxe de Cnide, Philolaos de Crotone, Archytas de Tarente, Hélicon de Cyzique, Eutocios d'Ascalon, Anthémius de Tralles, et d'autres, nettement moins connus. Mais c'est aussi le "Castel del Monte", ou encore notre chapelle d'Egra, édifices tellement frédéricstaufiens qu'ils s'en fusionnent d'avec Fibonacci et le nombre d'or. Dingue. Alors les crédules me diront à juste titre que je ne donne aucun exemple de nombre d'or pour notre chapelle d'Egra. Oui, vrai, parce que j'ai oublié. J'ai lu dans un ouvrage poussiéreux, mais je ne me souviens plus (et j'ai pas pris de note, andouille que je suis). Ceci-dit, comme 90% des églises romanes sont construites sur le même modèle de la divine proportion, si dans le cas particulier de notre chapelle vous rapporter la longueur sur la largeur des murs, ou du sol, ou de chais pas quoi, z'allez à coup sûr tomber sur 1.6 quelque part. Je vous en parie des bières à volonté.
Et pour vous dire à quel point le Fréderic II adorait sa gentilhommière à Egra, il y fit venir des sommités de tout l'empire, rien que pour leur montrer oh combien l'on vivait bien Bohême, et oh combien la chapelle St Martin, St Evrard et Ste Ursule était une splendeur unique d'envergure mondiale construite à l'essence de la divine proportion. Mentionnons pour info Léon Zitrone, Line Renaud, ou encore l'archevêque de Magdebourg, Albrecht II, qui, après avoir vu la chapelle romane, mit en chantier la première cathédrale gothique en Allemagne (Ste Catherine et St Maurice de Magdebourg).
Caracteristiques
L'édifice se compose de 2 chaplettes en étage conçues à l'origine comme totalement séparées: une chaplette basse, consacrée à St Martin et destinée à la messe pour la plèbe locale. Puis une chaplette haute, consacrée à St Evrard et Ste Ursule, destinée, elle, à la messe pour l'empereur (accessoirement sa suite). Originellement, chaque chaplette avait sa propre entrée: celle du haut était directement reliée au palais royal par une accourse en bois (le portail est toujours visible en hauteur sur le mur extérieur ouest). Celle du bas était accessible par une porte dans le mur sud, mais n'est plus visible, puisqu'elle se trouve aujourd'hui à 1,5 mètre sous le niveau du sol. Le rehaussement du niveau du sol était pratique courante au fil des siècles, ça évitait de passer la poussière et sortir les poubelles. Il suffisait une fois tous les N ans, au printemps, lors des grandes lessives, de jeter de la terre neuve sur tout le bordel, aplatir à la pelle, et hop, le ménage était fait.
D'extérieur, l'église ressemble à un bloc de pierre brute et contraste radicalement avec la finesse et la beauté intérieure. La chapelle du bas, typiquement romane et de forme carrée, est plafonnée d'une voûte en croisée d'ogives soutenue par 4 colonnes massives en granit. Remarquez oh-combien les massives colonnes en granit de la chapelle du bas s'opposent visuellement aux fines colonnes en marbre de la chapelle du haut. Eh ouais, entre la plèbe et la noblesse, c'est bouillie de pois contre caviar beluga. Une paire d'escaliers mènent ensuite au choeur, séparé de la nef par un portail quadri-colonnes dont les chapiteaux (de colonne) sont décorés de 12 personnages barbus à gauche, rasés à droite, et qui, selon les experts, représenteraient les 12 apôtres (évidemment, dès qu'il y en a douze, c'est soit des apôtres soit des oeufs). Le choeur est décoré d'une fenêtre gothique centrale du XIV ème siècle, tandis que les culots d'ogives sont sculptés de têtes humaines (allez savoir s'ils représentent quelqu'un?). Le haut de la nef est percé d'une ouverture octogonale donnant dans la chapelle du haut. Cette dernière, également de forme carrée, est aussi plafonnée d'une voûte en croisée d'ogives soutenue pareillement par 4 colonnes mais nettement moins massives, et en marbre. Cette chapelle est percée de fenêtres romanes, découvertes sous une lourde couche de crépi au XVIII ème siècle, puis remises en fonction lors des restaurations de 1996-1998. Et comme la chapelle précédente, celle-ci est percée (mais au sol) d'une ouverture octogonale donnant dans la chapelle du bas. Un escalier reliant les 2 chapelles fut construit au XIX ème siècle, à la demande du curé fatigué de courir de chapelle en chapelle pour nourrir ses ouailles d'hosties insipides. Cet escalier existe toujours, au grand bonheur des touristes, qui peuvent ainsi circuler aisément dans l'édifice. L'ouverture octogonale entre les chapelles haute et basse laisse pendre aujourd'hui un candélabre décoratif (ou un encensoir?), mais auparavant, il pendait là une corde permettant de sonner la cloche du sanctus (qui n'est plus depuis 1645). Sinon les plus perspicaces pourraient me demander "mais à quoi c'est-il donc que cette ouverture octogonale servait-elle dis-donc?" Selon mes sources, elle permettait à la haute de suivre d'en haut le baptême de la plèbe d'en bas. "Et pourquoi?" Ben parce que si le roi (empereur) obligeait ses esclaves importants (régisseur, intendant, prévôt, bistrotier...) à se faire baptiser, ben il pouvait surveiller que la cérémonie avait bien lieu, et que le bougre récalcitrant n'esquivait pas la flotte bénite de couler bien par d'sus son crâne impie. N'oubliez pas que le Bohémien moyen était païen, athée, voire hussite, mais clairement pas catholique (ou alors pas de sa propre volonté).
Et donc les plus fabuleuses splendeurs, ce sont les chapiteaux de colonnes dont certains sont rigolotement décorés. Dans la chapelle du bas, vous verrez principalement des ornements géométriques, avec des motifs végétaux de lianes lancéolées formant des frises (typique de l'art Rhénan). La colonne Nord-est est la plus remarquable, avec ses 4 têtes dans les coins, qui, selon les interprétations, représentent des anges, des évangélistes ou des présidents du mont Rushmore. Quant au chapiteau de la colonne Sud-ouest de la chapelle du haut, c'est la plus fabuleuse de toutes. Elle représente des vices (ou des péchés), genre parjure, luxure, avarice, égoïsme, hypocrisie, intempérance, jalousie, oisiveté, orgueil, paresse, vanité, gourmandise, colère, calomnie, poils aux jambes, comptes off-shore, etc... Parmi les plus explicites, vous ne pouvez louper au Sud-ouest le bougre barbu sa biroute dans la main. Devinez ce qu'il représente? Il s'agit d'une allégorie particulièrement osée pour cette période du moyen-âge et unique en Europe centrale. Et la posture féminine? Selon les historiens, il pourrait s'agir d'une satire envers la première femme de Frédéric Barberousse, Adèle de Vohbourg représentée en prostituée lascive, qui, pour cause de stérilité, fut accusée de tous les maux en particulier d'adultère impénitent, chronique, opiniâtre et endurci d'avec le palefrenier, le jardinier, le chauffeur, le postier, le plombier plonais, et même le contrôleur des impôts (qui bon chien veut tuer, la raige li met seure). Notez la vilaine grimace diabolique de la bouche de laquelle s'échappent des serpents, s'entortillent autour des cornes et se terminent derrière les oreilles de 2 personnages nus comme des vers. Enfin regardez bien de partout, parce que vous trouverez encore sur les culots, les chapiteaux, les clés de voûtes... des animaux, des dragons, des faciès humains qui datent de la construction originelle de la chapelle. C'est énorme moi j'dis.
Inutile de préciser que l'architecture hétéroclite romane et gothique de la chapelle blanchit les cheveux de moult historiens. Les fenêtres comme les colonnes sont de style roman tardif, tandis que les voûtes en croisée d'ogives sont typiquement gothiques. Hors il semblerait que ces éléments soient originels, et qu'aucun d'entre eux ne serait le fruit d'une ultérieure adjonction-(re)construction. Non, tout fut construit en une fois, selon un même projet. Et c'est justement ce qui caractérise ce style roman "staufien" que vous retrouvez en Campanie, dans les Pouilles ou encore en Sicile, un mélange de roman-gothique préfigurant l'avènement d'un style nouveau: le gothique pur style.
Ah oui, et la colonne cannelée en marbre dans le choeur n'est que pure décoration, sans doute rapportée par Fréderic II en souvenir de son pays rital natal. Ah oui, et encore la grille entourant le trou octogonal de la chapelle haute, grille qui évite au visiteur distrait d'aller se croûter 5 m plus bas, donc cette grille date de 1977 et est l'oeuvre d'un forgeron de "Teplice". Ah oui, et toujours, dans le choeur de la chapelle haute, à gauche, se trouve des escaliers en colimaçon, qui mènent à une petite chambrette pourvue d'une cheminée renaissance. Lors de ma visite, l'accès n'était pas possible (vu que je ne m'en suis même pas rendu compte qu'il y en avait un, d'accès), du coup j'ai pas de photo. Mais selon mes sources, vivait là entre 1458 et 1477, un certain "Zikmund Wann" (i.e. "Sigmund Wann"), alchimiste de son état, et qui aurait découvert l'élixir d'éternelle jeunesse (et moi qui croyait que c'était le Réal qui l'avait inventé, parce qu'il le vaut bien). Alors notez que le Sigismond aurait réellement existé, et se serait particulièrement révélé dans la ville de "Wunsiedel" en Bavière, à 35 km d'Egra, comme fondateur de l'hôpital. Mais en aurait-il pour autant inventé l'élixir de jeunesse?
Evolution
Après les Germains, ce sont les Bohémiens qui eurent possession et jouissance des lieux. Et c'est ainsi qu'en 1322, Jean de Luxembourg (roi de Bohême), transforma le primitif "pfalz" germain en splendide château fort gothique bohémien. Au XV ème siècle, le palais royal fut augmenté d'un étage, le domaine complété de dépendances, et la protection étendue à 2 tours supplémentaires. En 1564, la ville d'Egra convertit en la religion luthérienne, et les messes prirent fin en la chapelle. Dans la seconde moitié du XVII ème siècle, le château fort devint citadelle baroque, avec ses hauts murs en briques et ses casemates. La chapelle devint Ste Barbe (entrepôt de poudre à canon), ce qui la sauva de la démolition. Les siècles suivants, la forteresse perdit en intérêt pour gagner en ruine. Une bourrasque du tonnerre de d'là arracha le toit de la chapelle en 1762, et ce n'est qu'en 1818 qu'eut lieu la restauration. Ensuite pratiquement plus rien, jusqu'en 1996-1998 puis 2000-2003 lorsqu'eurent lieu simultanément fouilles et restaurations d'envergure autant d'extérieur que d'intérieur. Alors justement, en parlant de fouilles, lors de celles de 1997, l'on découvrit des fondations de l'ancienne églisette (d'avant la chapelle) datant du X ème siècle. L'on découvrit également une statuette en bronze représentant un p'tit animal, et qui, selon les experts, servait d'offrande à St Martin, le patron de la chapelle inferieure.
Alors notez qu'au château de Nuremberg, vous trouverez l'équivalent de la chapelle d'Egra, en 2 fois plus grand: la Kaiserkapelle ou Oberkapelle. Elle date d'environ 1200, se compose de 2 chaplettes superposées, percées d'un trou en leur centre et 4 colonnes supportant le plafond. Pareil, style staufien mais nettement moins unique que la chapelle d'Egra. La chapelle d'Egra, mieux y a pas. Et puisqu'on parle de Nuremberg, je vous informe encore qu'Egra se trouve sur la route des châteaux, comme Nuremberg, et qu'icelle route est plutôt sympathique à faire (si vous êtes carrossés), mais avec discernement cependant, car certaines ruines ne méritent vraiment pas le détour.
Bon, eh bien vous savez tout maintenant sur cette double-chapelle ("doppelkapelle" en Allemand), qui survécut jusqu'à nos jours par le plus grand des miracles. Oh bien sûr, ce n'est pas l'unique chapelle en son genre, en son style ni en son âge, mais sa splendide décoration hyper-symbolique et ultra-osée en font une exception que vous devez visiter, juste là: 50.0814181N, 12.3664253E.
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Je vous remercie.